dimanche 25 octobre 2015

Chapitre 12 – 1841 à 1845 La difficile succession de La Bourdonnais

Contenu du chapitre 12

Saint-Amant successeur désigné de La Bourdonnais – Le Cercle des échecs au-dessus du Café de la Régence – Le Chevalier de Barneville – Une histoire de fou – Le talent grandissant de Kieseritzky – Match par correspondance contre Pesth – Deschapelles claque la porte de la Régence – Saint-Amant en Angleterre et victoire contre Staunton – Défaite à Paris au Cercle des échecs de Saint-Amant contre Staunton – Un tableau historique… à l’origine d’un procès – Troisième match avorté entre Saint-Amant et Staunton – Fin de la suprématie des joueurs d’échecs français

Pierre Charles Fournier de Saint-Amant - Le Palamède 1842

Le décès de La Bourdonnais, le 13 décembre 1840 à Londres, laisse un grand vide pour les échecs en France.
Deschapelles est trop vieux pour reprendre le flambeau (il a alors 60 ans).
C'est ainsi que le redoutable privilège de prendre le "sceptre des échecs français" revient à Saint-Amant.
Mais contrairement à La Bourdonnais, celui-ci n'est pas un professionnel du jeu d'échecs.
Son activité principal est essentiellement axée autour du négoce des vins de Bordeaux.
Sa boutique est à deux pas du Café de la Régence, au 42 rue Saint-Thomas du Louvre.

Lors d'un séjour à Londres au début du printemps de l'année 1843, Saint-Amant en profite pour jouer et remporter un petit match face à l'anglais Staunton (+3 = 1 -2).
Rendez-vous est pris par les deux joueurs pour une revanche.
Celle-ci a lieu à Paris à la fin de la même année 1843 au Cercle des échecs de Paris alors situé au-dessus du Café de la Régence.
Mais cette fois-ci c'est une déroute pour Saint-Amant.
Les deux joueurs ont convenu que le vainqueur serait le premier à remporter 11 parties.
Et après seulement 8 parties, Saint-Amant en a déjà perdu 7 pour un seul résultat nul.
Le score final sera de +11 =4 -6 pour Staunton.

Un troisième match est donc nécessaire pour départager les deux joueurs.
Mais après un échange de "politesses" entre les deux joueurs, Staunton esquive cette rencontre qui ne se jouera jamais.

Après plus d'un siècle de suprématie mondiale dans le jeu d'échecs, c'est la fin de la domination pour les français...
  

mercredi 21 octobre 2015

Chapitre 11 – 1839 Le Café de la Régence vu par un Anglais

Contenu du chapitre 11

Un touriste anglais à Paris en 1839 – De la place de la Bourse au Palais-Royal – Un parallélogramme de tartine de fromage – Le Café de la Régence succursale de Charenton – Napoléon et le Café de la Régence – Boncourt et Saint-Amant – Le Café de la Régence Temple des échecs – Monsieur Pillefranc – La Bourdonnais Roi des échecs et sa cour

Georges Walker (au centre)

Nous sommes en hiver 1839 et il neige ce jour-là sur Paris.
Vous avez décidé de faire un saut au fameux temple des échecs connu à travers toute l’Europe.
Il vous a été reporté que l’ambiance y est particulière et que le lieu vaut le coup d’œil…

Le chapitre 11 du tome 1 reproduit le texte de l'anglais Georges Walker qui se rend au Café de la Régence peu de temps avant la mort de La Bourdonnais.
Vous pouvez trouver le texte complet sur internet, et notamment dans la revue Le Palamède de 1843 (page 298).
Je vous renvoie à mon article bibliographique à ce sujet.

samedi 17 octobre 2015

Retrouvez-moi le vendredi 23 octobre à 20h30 au club du Canal Saint-Martin

Retrouvez-moi le vendredi 23 octobre à 20h30 au club du Canal Saint-Martin pour une séance de dédicaces avec Stéphane Laborde.
Merci à Xavier Rubini de nous accueillir.


vendredi 23 octobre 2015

Stéphane Laborde dédicacera, dès 20h30, au Café de l'Est Parisien :

le livre de Ruy Lopez (1561) qu'il vient de traduire en français dans une présentation modernisée

le livre de PhilidOr (Analyse du jeu d'échecs), nouvelle édition

Jean-Olivier Leconte dédicacera, dès 20h30, au Café de l'Est Parisien :


- son livre "Café de la Régence" tome 1

- ainsi que le tome 2 "Café de la Régence" qui vient de paraître !

la soirée se poursuivra par 2 tournois de blitz homologués

Lien avec l'article sur le blog du Canal Saint-Martin

mardi 13 octobre 2015

Chapitre 10 – 1832 à 1840 La Gloire de La Bourdonnais

Contenu du chapitre 10

Louis-Philippe Roi des Français – Le Café de la Régence est très fréquenté – Galerie de portrait par Alphonse Delannoy – Le Club des Panoramas – Le défi par correspondance entre Paris et Londres – Le club de la rue de Ménars – Retour de Deschapelles aux échecs – Claude Vielle, le plus important des propriétaires du Café de la Régence – La Bourdonnais sur les traces de Philidor – L’automate turc orphelin : décès de Mouret et de Maëlzel – Fin du cercle de la rue de Ménars et retour au Café de la Régence des plus forts joueurs d’échecs – Décès de La Bourdonnais

Illustration du livre Les Français peints par eux-mêmes - Paris, 1840
Le Cercle des échecs de la rue de Ménars

Huit années durant lesquelles La Bourdonnais s'imposent comme le meilleur joueur d'échecs du monde en battant Mac Donnell à Londres dans une longue série de matchs en 1834.
Le même La Bourdonnais qui crée la première revue entièrement consacrée au jeu d'échecs : Le Palamède en 1836.

C'est peut-être ces voyages à Londres qui incite La Bourdonnais à créer un cercle des échecs sur le modèle des clubs anglais. Une partie des joueurs du Café de la Régence souhaitent trouver un lieu plus propice qu'un café bruyant pour s'adonner à leur passion.
A cette époque une première tentative est faite par Aaron Alexandre au Café de l'échiquier près de la Bourse de Paris. Nouvelle tentative près du passage des Panoramas avec le club des Panoramas qui ne résistent pas très longtemps au loyer et au bruit des concerts Mussard, puis les joueurs d'échecs s'installent rue de Ménars...

Mais c'est un échec, et la revue Le Palamède de 1839 nous indique :

"Les amateurs d’échecs sont aujourd’hui, grâce à cette dissolution(*), comme les enfants d’Israël, un peu disséminés partout.
(...)  il nous parait impossible que dans une ville comme Paris, un cercle des échecs ne puisse s’établir "
(*) Sous-entendu du Cercle des échecs de la rue de Ménars

Faute de réussir à réunir suffisamment de cotisations, la création d'un Cercle d'échecs parisien durable reste un échec durant cette période. Les joueurs d'échecs vont alors naturellement revenir au Café de la Régence en 1839. Un café qui n'a jamais cessé de recevoir les amateurs d'échecs.

Voici une des parties jouées par La Bourdonnais contre Mac Donnell à Londres en 1834 (pour visualiser la partie il vous faut un lecteur d'Adobe Flash).
La position finale est assez originale. Notez le style de jeu très dynamique de La Bourdonnais.

MacDonnell / La Bourdonnais - Londres, 1834 - 4ème match - 16ème partie.



[Event "London m4"] [Site "London"] [Date "1834"] [Round "16"] [White "McDonnell, Alexander"] [Black "De Labourdonnais, Louis Charles Mahe"] [Result "0-1"] [ECO "B32"] [PlyCount "74"] [EventDate "1834"] [EventType "match"] [EventRounds "18"] [EventCountry "ENG"] 1. e4 c5 2. Nf3 Nc6 3. d4 cxd4 4. Nxd4 e5 5. Nxc6 bxc6 6. Bc4 Nf6 7. Bg5 Be7 8. Qe2 d5 9. Bxf6 Bxf6 10. Bb3 O-O 11. O-O a5 12. exd5 cxd5 13. Rd1 d4 14. c4 Qb6 15. Bc2 Bb7 16. Nd2 Rae8 17. Ne4 Bd8 18. c5 Qc6 19. f3 Be7 20. Rac1 f5 21. Qc4+ Kh8 22. Ba4 Qh6 23. Bxe8 fxe4 24. c6 exf3 25. Rc2 Qe3+ 26. Kh1 Bc8 27. Bd7 f2 28. Rf1 d3 29. Rc3 Bxd7 30. cxd7 e4 31. Qc8 Bd8 32. Qc4 Qe1 33. Rc1 d2 34. Qc5 Rg8 35. Rd1 e3 36. Qc3 Qxd1 37. Rxd1 e2 0-1

samedi 10 octobre 2015

Les émeutes de juin 1832

Nous sommes deux ans après les Trois Glorieuses journées de juillet (27, 28 et 29 juillet 1830).
Louis-Philippe, Roi des Français est au pouvoir.
Et cette année 1832 est difficile pour la population parisienne.
Au mois de mars une épidémie de Choléra commence à ravager la capitale.

Vous trouverez ici un texte très intéressant sur cet épisode historique.

Le président du Conseil, Casimir Périer, décède de ce mal le 16 mai 1832.
Quelques semaines plus tard, le 1er juin, c'est au tour du général Lamarque de décéder du Choléra.
Lamarque est très populaire de part son image d'homme politique issu de la Révolution française de 1789 et de son engagement républicain.

Ses obsèques se déroulent le 5 juin 1832, et très vite l'évènement dégénère.
Les insurgés sont écrasés par l'armée. C'est une véritable déroute.

Quel lien avec le Café de la Régence me direz vous ?

Tout simplement car un des plus forts joueurs d'échecs du Monde à cet époque est directement impliqué.
Il s'agit de Deschapelles, qui est à la tête de cette insurrection selon le préfet de police de l'époque, Henri Gisquet.


Dans son rapport au sujet des émeutes de juin 1832, consultable par exemple aux archives de la Préfecture de police de Paris, on peut lire :

" (…) Toutes les informations que j’ai recueillies me confirment dans la pensée que le plan était de renverser le Gouvernement au nom de la république pour arriver avec moins de difficultés au retour de la famille exilée (*) .

C’est sans doute pourquoi l’on avait décidé de donner à cette république une physionomie tellement repoussante et des appuis tellement ignobles qu’elle ne put avoir qu’une durée éphémère et qu’elle fut promptement anéantie par l’indignation de tous ceux qui avaient quelque chose à conserver.

Cette réflexion me fait comprendre comment on avait choisi pour Dictateur un homme obscur comme Deschapelles, pour Tribuns et chefs de Cohortes des hommes méprisables professant des opinions au moins équivoques et pour Généraux de l’armée Française, des militaires qui ne figurent pas dans ses rangs.

Combien de pareils documents sont propres à justifier les mesures prises par le Gouvernement et doivent ajouter à la reconnaissance du pays pour le courage et le dévouement de la garde Nationale et des troupes dont l’union à protégé la Capitale contre ces exécrables projets. " (extrait du rapport Gisquet)

(*) Il s'agit de la famille de Charles X contraint d'abdiquer en 1830 suite aux Trois Glorieuses.

C'est sous le nom de conspiration Gauloise que Deschapelles mène la danse.

"M. Deschapelles a l’imprudence de toujours porter sur lui la liste des conspirateurs des différents quartiers. " (extrait du rapport Gisquet)

Curieusement, alors que tout son entourage de conspirateurs est jugé et condamné, pour certains aux assises, Deschapelles échappe à tout ça, bien que désigné comme coupable numéro 1 par le préfet de police...

L'explication vient quelques années plus tard, par exemple avec cet extrait d'un texte d'Etienne Cabet - Les Masques arrachés - Paris 1844

"Que de mal n’a pas fait l’Émeute de juin, cette émeute désapprouvée par toute la tête du Parti révolutionnaire qui voulait ne considérer le convoi de Lamarque que comme une revue des forces populaires et qui préférait livrer la bataille un mois après, à l’anniversaire de juillet ; cette émeute, commencée par une petite société secrète, la Société Gauloise, composée de républicains et de carlistes, organisée et dirigée par un spéculateur à la Bourse qui se nommait dictateur, et qui croyait follement tout entraîner avec une poignée d’hommes, cette émeute qui amena l’état de siège, qui engagea si malheureusement la Banlieue, qui fit tant de victimes et qui empêcha une révolution certaine un mois plus tard !"

Ces évènements de juin 1832 inspirèrent Victor Hugo pour son chef d’œuvre "Les Misérables".
Voici un extrait du film "Les Misérables" de 1958, magnifique adaptation de Jean-Paul Le Chanois du texte de Victor Hugo.
Cet extrait correspond aux obsèques du général Lamarque et aux émeutes qui suivirent.



Les Misérables, Insurrection républicaine de... par Republique1793

lundi 5 octobre 2015

Le Café de la Régence - Tome II

J'ai le plaisir de vous annoncer la mise en ligne du deuxième tome de mon ouvrage sur l'histoire du Café de la Régence. Celui-ci est en vente sur le site "The Book Edition".


4ème de couverture :

Au milieu du XIXe siècle, le Café de la Régence échappe de peu à une disparition due aux grands travaux parisiens sous Napoléon III. Mais grâce à la passion pour les échecs de son propriétaire de l’époque, Claude Vielle, le Café de la Régence trouve une nouvelle adresse. S’ouvrent alors de nouveaux chapitres glorieux de son histoire : Morphy, Kolisch, Rosenthal, Lasker, Capablanca, Alekhine, Tartakover, etc. une liste non exhaustive des champions qui marquèrent cette nouvelle époque.

Jean-Olivier Leconte, Maître FIDE, retrace en détail l’histoire de ce lieu unique aujourd’hui disparu.
Le 2ème tome traite de la période allant de 1853 à la disparition du Café de la Régence en 1955.

dimanche 4 octobre 2015

Le Tournoi de Monte-Carlo

Précisons tout d'abord que Monte-Carlo est le quartier de Monaco qui abrite le fameux casino.

Et donc en ce moment se joue le Grand Prix féminin qui réuni les plus fortes joueuses d'échecs de la planète.
Les filles jouent dans le célèbre casino de Monte-Carlo, plus exactement dans la magnifique salle Jules Touzet du nom de son architecte.

La salle Touzet au début du XXe siècle

Ceci me sert d'argument pour vous raconter une anecdote survenue lors du premier tournoi de Monte-Carlo en 1901.
Deux joueurs du Café de la Régence sont directement impliqués dans ce 1er tournoi de Monte-Carlo :
Jules Arnous de Rivière en tant qu'arbitre et surtout David Janowski.


Les participants du tournoi de 1901 (sauf Janowski !).
Jules Arnous de Rivière est debout sur la droite avec la barbe blanche.

Cette anecdote est tirée du livre en russe "David Janowski" paru en URSS en 1987 et dont les auteurs sont Voronkov et Plissetski.

(Merci à mon épouse qui me sert de traductrice !)

David Janowski arrive à Paris en 1891.
Voici comment La Stratégie (1891) qualifie ce jeune joueur qui vient d'arriver.

"Depuis quelques semaines est fixé à Paris, un jeune amateur russe d’une très grande force, M. Janowsky dont le jeu a un caractère particulièrement brillant et imprévu."

Et il restera à Paris et au Café de la Régence jusqu'au début de la 1er Guerre Mondiale.
Durant toute cette période Janowski sera le joueur n°1 du Café de la Régence et tout simplement un des meilleurs joueurs du monde à cette époque.

Donc revenons à Monte-Carlo en 1901 et cette anecdote :

David Janowski remporte brillamment ce tournoi (en l'absence du champion du Monde Lasker) et le prix conséquent de 5000 francs qui va avec.
Connaissant lui-même son penchant pour les jeux de casino, Janowski envoie 4000 francs à Paris, en confiant cet argent à des amis et garde 1000 francs avec lui.
Mais surtout il leur interdit sous aucun prétexte de lui céder cet argent dans le cas où lui-même leur demanderait avant son retour à Paris (Peut-être est-ce Jules Arnous de Rivière a qui il confie cet argent).

David Janowski, un joueur au style d'attaque redoutable

Comme prévu, David Janowski perd rapidement au casino les 1000 francs qu'il avait conservé sur lui, voire même plus, car l'histoire nous dit qu'il n'avait plus d'argent pour revenir à Paris.
Aussitôt, il télégraphie à ses amis à Paris de lui envoyer des sous.

Respectant leur contrat moral, ses amis refusent tout d'abord de lui envoyer.
David Janowski les menace d'un procès et ils finissent par lui envoyer une partie des 4000 francs encore disponibles.
L'histoire se répète en boucle, Janowski joue, perd et menace ses amis qui finissent par lui envoyer tout l'argent qu'il avait gagné.

Après avoir remporté si difficilement cet argent, ce fut un désastre sur les tables vertes du casino.
Et c'est ainsi que le prix offert par le casino est revenu dans ses caisses...

J'espère que la gagnante de ce tournoi ne fera pas la même bêtise !

vendredi 2 octobre 2015

Chapitre 9 – 1821 à 1831 de la Restauration aux Trois Glorieuses

Contenu du chapitre 9

Une anecdote délicieuse de Mouret et La Bourdonnais – Alphonse Delannoy chroniqueur d’échecs du XIXe siècle découvre le Café de la Régence – Joseph Evezard nouveau propriétaire du Café de la Régence – Étienne de Jouy académicien se rend au Café de la Régence – Les Trois Glorieuses – Fuite des plus forts joueurs d’échecs et fondation du Cercle des Échecs de Paris


"Le Gastronome - Journal universel du goût" - 14 novembre1830


C'est l'époque où La Bourdonnais prend la place de Deschapelles comme meilleur joueur d'échecs du Monde.
Ce jeu d'échecs qui retrouve ses lettres de noblesse au Café de la Régence, dont le propriétaire est un certain Joseph Evezard.

Les glorieuses journée parisiennes de juillet 1830 se déroulent en partie sur la Place du Palais-Royal avec les joueurs d'échecs aux premières loges (voir cet article puis celui-ci à ce sujet).
Un échec pour le peuple, car c'est finalement un roi bourgeois qui prend la place d'un roi d'ancien régime.

C'est également à cette époque, sans doute sous l'influence des clubs tels qu'ils sont en Angleterre, que les joueurs d'échecs se mettent en quête d'un lieu plus propice pour jouer aux échecs.
Ceci plutôt qu'un café bruyant situé dans un lieu soumis aux aléas de l'histoire du fait de sa proximité géographique avec le pouvoir.