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samedi 26 octobre 2024

Alekhine, d’une patrie à l’autre, sous les couleurs Françaises, par Guy Gignac

Guy Gignac (Québec) vient de publier, à compte d’auteur, un formidable opuscule qui retrace la vie d’Alekhine. Une bonne synthèse biographique de la vie tumultueuse du 4ème champion du Monde d'échecs.


Guy est un collectionneur incoercible de tout ce qui touche de près ou de loin à Alekhine et je ne peux que vous recommander d’acquérir son livre, en contactant l’auteur directement à son adresse courriel gignac_guy@hotmail.com
 
La préface de Thierry Lafargue

Un seul (petit) regret : le lecteur avide, que je suis, attendait une iconographie encore plus riche !
 
  
Un document exceptionnel de la collection de Guy et publié dans son livre.
Photo de l'équipe de France aux olympiades de Hambourg en 1930
De gauche à droite, Aristide Gromer, Marcel Duchamp, Alexandre Alekhine, André Voisin, Louis Betbeder 
Notez la dédicace : Le 24.7.1930 Meilleures pensées aux amis du Cercle Philidor, restés à Paris

Par exemple en page 34, Guy parle, sans le montrer, d’un encrier offert à Alekhine lors de l’olympiade d’échecs à Paris en 1924 et qu’il a acquis. Vous pouvez voir une photo de cet objet incroyable dans un article que j’ai publié en juillet dernier. Photo que Guy m'avait généreusement autorisé à publier sur ce blog.
 

L'encrier offert à Alekhine à Paris en 1924 - Collection Guy Gignac
 
Sommaire 




mercredi 19 juin 2024

La première Olympiade du jeu d’échecs et Création de la FI(D)E – Le tournoi – 3 sur 4

русский перевод
English translation of this article

Troisième partie des articles consacrés à la première Olympiade du jeu d’échecs et à la création de la FI(D)E.

Je remercie tout particulièrement M. Guy Gignac qui m’a communiqué un document exceptionnel. Il s’agit du programme du « Tournoi International d’amateurs d’échecs », dont vous avez les photos ci-dessous.
 

 


Outre la liste des participants des différentes nations, on peut voir que le président de la commission des arbitres n’est autre qu’Alexandre Alekhine (qui n’est pas encore champion du Monde, ni Français à l’époque).

La compétition d’échecs se déroulera en 3 parties : une épreuve préliminaire, un tournoi entre les vainqueurs, et un tournoi entre les perdants, dit « subsidiaire ». Il est prévu un classement individuel et un classement des Nations.

Ceci est bien expliqué par Gaston Legrain dans sa chronique d’échecs pour le journal L’Action Française du 7 juillet 1924.
 
L'Action Française du 7 juillet 1924 - Retronews
 
TOURNOI OLYMPIQUE D’ÉCHECS
 
Dans sa séance du 21 juin, la Fédération Française des Échecs a décidé de diviser le tournoi en trois phases : 

1 - Épreuves préliminaires. — Il sera formé des groupes égaux. Aucune nation ne sera représentée par plus d'un joueur par groupe. Chaque groupe jouera un tournoi à un tour. 

2 - Tournoi des vainqueurs. — Les concurrents classés premiers dans les épreuves préliminaires joueront un tournoi à un tour. Le vainqueur de ce tournoi sera nommé champion des amateurs d’échecs de la VIIIe Olympiade. 

3 - Classement subsidiaire des nations. — Les concurrents exclus du tournoi des vainqueurs joueront un nombre de parties égal à celui joué par les concurrents du tournoi des vainqueurs en évitant la rencontre de deux joueurs d'une même nation. Le classement des nations sera fait en additionnant les points de tous les joueurs de claque nation dans les trois épreuves. 

Durée du tournoi : du samedi 12 juillet, 14 heures, au dimanche 20 juillet, 18 heures. Séances de 14 à 18 heures et de 20 à 24 heures. Soit 17 séances. 

Temps de réflexion : 90 coups pour les deux premières heures et ensuite 20 coups à l'heure.
Cette lutte de 19 nations, représentées. par 60 amateurs réputés, est un évènement qui marquera dans les Annales des Échecs. C'est un triomphe de l'esprit sportif que la mêlée de tant de combattants accourus vers nous de loin, de bien loin, pour conquérir, non pas quelques gros chèques, mais les seuls lauriers de la gloire. 

Si la Grande Presse consent à secouer son indifférence et commente ce tournoi avec un peu de l'enthousiasme qu'elle prodigue aux menus exploits des boxeurs, la cause des Échecs en France est gagnée. Là-haut, contemplant la nouvelle ère de prospérité du jeu qui l'immortalisa, Philidor nous sourira.
 
GASTON LEGRAIN. 

Dans le compte rendu du tournoi paru dans le Bulletin n°12 de la FFE – Juillet Août Septembre 1924, Pierre Vincent écrit :

Et c’est pourquoi notre champion, G. Renaud, a pu écrire dans une édition spéciale de sa remarquable chronique d’Échecs dans l’Éclaireur de Nice :

« Au clair matin du 12 juillet dernier, dans la salle des Fêtes de la mairie du IXe arrondissement, à Paris, cinquante cinq joueurs, appartenant à dix-huit nations différentes, répondirent présents à l’appel des concurrents.
Les uns comme les Argentins avaient franchi l’Océan pour venir disputer leur chance et représenter l’Amérique latine.
D’autres comme les Lettons ou les finlandais avaient traversé l’Europe dans sa largeur et voyagé cinq nuits et quatre jours consécutifs… Et tous étaient là, maintenant, animés du même désir de vaincre, avec l’espoir de soutenir haut et ferme le drapeau de leur pays.

Et ce matin radieux du 12 juillet 1924 était en même temps comme l’aube d’une ère nouvelle dans l’histoire des Échecs. Certes déjà, à Paris même en 1900 pour la dernière fois, un tournoi international avait eu lieu et depuis, en tous pays du globe, d’importantes compétitions. Mais jamais on n’avait vu, accourue de dix huit nations, l’élite des amateurs d’Échecs des deux mondes, venir sans but lucratif, uniquement pour tenter de conquérir un titre enviable et glorieux : celui de champion de la VIIIe Olympiade. »
 
La mairie du 9ème arrondissement de Paris
 
La salle du conseil municipal, anciennement salle des fêtes, lieu du tournoi et de la signature de la création de la FIDE.
 

 


 
 
 
 
 
Photo parue dans le journal Excelsior - 13 juillet 1924 - Retronews.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Extrait du journal Le Gaulois du 13 juillet 1924, cité dans le bulletin numéro 12 de la FFE.

« A 10 heures précises – joueurs d’Échecs sont gens ponctuels – M. Lucien Sauphar, maire du IXe arrondissement dont on ne saurait trop louer la bienveillante générosité, prononçait les paroles de bienvenue en sa grande salle des Fêtes où il donne une large hospitalité aux concurrents de ce tournoi ; M. Mesureur ancien ministre du Commerce présidait ; dans un charmant discours d’ouverture, il dit tout le bien que l’on doit attendre du célèbre jeu pour la formation de l’esprit et montra que, complétement harmonieux des jeux de stade qui font valoir la discipline, la grâce et la force du corps, ce tournoi vient mettre en lumière la pure beauté des spéculations intellectuelles qui attestent l’équilibre de l’esprit.

Cinquante-cinq joueurs répondirent à l’appel de leur nom, puis M. Georges Renaud, champion de France, lut, dans le Livre d’Or de la Fédération Française des Échecs, le serment :

Nous jurons que nous nous présentons au Tournoi international d’Échecs, organisé à l’occasion de la célébration de la VIIIe Olympiades, en concurrents loyaux, respectueux des règlements du tournoi, pour l’honneur de nos pays et la gloire du jeu des Échecs.

Cinquante cinq bras levés confirmèrent les paroles du champion français et les cinquante-cinq concurrents apposèrent leu signature sur le Livre d’Or de la Fédération Française des Échecs.
»

La commission des arbitres est mise sous la présidence d’Alexandre Alekhine, chaque pays ayant un représentant. La première ronde eut lieu à 14h le samedi 12 juillet. Chaque joueur devait jouer 5 parties dans les épreuves préliminaires, et 8 parties dans le tournoi suivant (tournoi des vainqueurs ou tournoi subsidiaire pour les joueurs non qualifiés).
 
Revue L'échiquier 1925 - Photo de la partie décisive pour désigner le vainqueur du tournoi individuel.

Le tournoi des vainqueurs garde un certain suspense jusqu’à la dernière partie.
Le bulletin numéro 12 de la FFE indique :

« Colle, Tchepurnoff et Mattison peuvent donc gagner le tournoi. Il faut, pour que Tchepurnoff gagne, qu’il batte son adversaire et que Colle batte Mattison. Il aura alors 5 et Colle aussi, mais comme il a battu Colle il sera premier.

Pour que Colle soit vainqueur, il lui faut battre Mattison. Quel que soit le résultat entre Tchepurnoff et Apschenek, il aura le meilleur résultat des trois joueurs terminant avec 5. Pour que Mattison soit vainqueur, il lui suffit de faire nulle.

Or, Colle obtient rapidement une partie supérieure. Mattison doit sacrifier une qualité pour avoir des contre-chances et Colle a le gain sous la main… D’autant que Tchepurnoff vient de perdre. Les journalistes préparent déjà leurs télégrammes pour célébrer la victoire de Colle…

Mais le jeune maître, pressé d’en finir, joue quelques coups imprudents et se trouve quasi perdu. A 13 heures, la partie est ajournée. A la reprise à 15 heures, il parvient à annuler. Mattison est champion des amateurs d’Échecs de la VIIIe Olympiade.
»

Curieusement je n'ai pas trouvé dans les revues de l'époque, ni sur internet, la partie complète Colle vs Mattison (il semble manquer les coups après la reprise de la partie), partie pourtant décisive.
 
Hermann (Hermanis) Mattison, vainqueur du tournoi individuel.
Photo : La Stratégie 1924

dimanche 6 août 2023

Jeanne Le Bey-Taillis et le cercle Caïssa

Mise à jour le 11/08/2023 : Précisions au sujet de l'état civil de Mme Le Bey-Taillis, par Philippe Bodard (voir un peu plus bas dans l'article).
 
Le dernier numéro de la revue Philemat (numéro 120 juin 2023 - Bulletin de l'Amicale Philatélique Thèméchecs) contient un article très intéressant au sujet de Mme Jeanne Le Bey-Taillis et le cercle Caïssa.
Cet article a été écrit par Guy Gignac (Canada) et il m'a autorisé à le reproduire sur ce blog, ce dont je le remercie.

Vous avez le texte ci-après, que j'ai complété avec quelques précisions sur le cercle Caïssa (la date de création indiquée dans l'article est erronée), ainsi que des photos de Mme Le Bey-Taillis et deux parties inédites en lien avec le cercle Caïssa. J'ai également laissé telle quelle l'orthographe du nom Tartacover qui est acceptée au même titre que Tartakover.

Avec Jeanne Léon-Martin et Chantal Chaudé de Silans, Jeanne Le Bey-Taillis fait partie du groupe très fermé des femmes qui ont œuvré pour le développement des échecs féminins en France au XXe siècle.
 
Collection André Muffang - Avec l'aimable autorisation de Christophe Bouton.
Jeanne Le Bey-Taillis, photo non datée (les années 1950 ?) ni localisée.
 
Complément du 11/08/2023 - Merci à Philippe Bodard pour les précisions ci-dessous au sujet de l'état civil de Mme Le Bey-Taillis
 
- née Jeanne Marie Thérèse MARC le 28 juillet 1880 à Pagny-sur-Meuse (Meuse)
- mariée le 24 septembre 1900 à Lille (Nord) avec Prosper Adolphe Germain Joseph LE BEY TAILLIS, né le 22 juin 1871 à Picauville (Manche)
- décédée à Paris dans le 14ème arrondissement le 19 juin 1969

Il apparait qu'à son décès il n'y avait aucun parent de présent, car l'acte a été mal rédigé : il est indiqué MARQUE au lieu de MARC (au contraire des actes de naissance et mariage, et contraire au nom de son père). De plus il est indiqué 1879 (faux) sans précision et sans lieu comme année de naissance. Enfin le prénom du mari est indiqué inconnu (elle était veuve).
 
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Hommage à Mme Jeanne Le Bey-Taillis (par Guy Gignac)

En 1938, le directeur bien connu de différents palaces parisiens M. Léonard Tauber eut l'idée de réunir dans la capitale tous les amateurs d'échecs dans un endroit enchanteur. Bien que le concept lui revînt d'emblée (le mécène amassa une fortune colossale grâce à ses activités hôtelières) la mise en œuvre eut lieu l'année suivante au 5, avenue Gabriel dans le 8e arrondissement de Paris grâce à Mme Jeanne Le Bey-Taillis, sa fondatrice et dirigeante. Cette femme d'exception sut réunir en peu de temps les meilleurs joueurs français et étrangers.
 

 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le club Caïssa devint rapidement empreint d'histoire, grâce à la présence de forts joueurs tels le franco-américain Nicolas Rossolimo et la figure emblématique du jeu d'échecs en France, Xavier Tartacover (1).

Une revue rarissime

En 1943, Mme Le Bey-Taillis édita une revue mensuelle sans surprise sous l'appellation Caïssa. Différents sujets furent élaborés au bénéfice des lecteurs tel des études, des problèmes, un concours échelle et des rapports du Championnat de France. Malheureusement, la revue eut une vie éphémère. La publication prit fin brusquement après le cinquième bulletin l'année suivante. J'eus la chance d'acquérir tous ces numéros et bien d'autres items grâce à l'amabilité de mon ami Thierry Lafargue.
 

 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Un club d'échecs mythique

Une atmosphère particulière émergea autant à l'intérieur des murs qu'à l'extérieur de cette brasserie du premier étage situé au 9 Boulevard Montmartre. Des lampes à gaz propagèrent une lumière bleutée, tandis qu'à l'intérieur, des débats animés aussi différents soient-ils s'ensuivirent avec les occupants de la place.

Ouvert tous les jours de 15 heures à 24 heures, les thèmes abordés changèrent en fonction des goûts de chacun : l'astrologie, la philosophie, la religion, la politique, les mathématiques et même l'occultisme.
Mme Jeanne Le Bey-Taillis, cette petite femme élégante aux cheveux blonds, attira tous les regards. Meneuse d'hommes chevronnée et appréciée par ses pairs, elle eut les bons mots pour réconforter les victimes et complimenter les bourreaux ! Elle organisa régulièrement des tournois, dont le fameux tournoi de Noël.

Habitué des lieux et ne dérogeant pas à ses habitudes, le maître Tartacover arrivait d'ordinaire à 14h05 précisément. Il commandait la plupart du temps un café crème et demandait son journal. Après un moment, il le repliait et regardait distraitement l'échiquier, poussait une pièce et reprenait sa lecture ! Féru de mondanités, ses collègues le surnommèrent sarcastiquement Tartacaviar.

La patronne n'est plus

Le 19 juin 1969, une page des échecs français prit fin avec la mort de Mme Jeanne Le Bey-Taillis. Atteinte d'hémiplégie (une forme particulière de paralysie d'un côté du corps, causée par une atteinte au cerveau), elle succomba deux mois plus tard à l'hôpital Cochin. Ses obsèques eurent lieu le 24 juin à Paris, en l'église St-Jacques du Haut-Pas. De nombreuses personnes vinrent lui rendre un ultime hommage. Elle fut inhumée au cimetière de Grosrouvre.
 

 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Journal "La France de Bordeaux et du Sud-Ouest - 16 septembre 1941 - Retronews 
Jeanne Le Bey-Taillis participe à ce championnat de France.  Elle est à gauche sur la photo avec Mme Grace Alekhine en face d'elle. Debout à gauche il me semble reconnaitre César Boutteville.
 
 
Présidente d'honneur de la FFE, et de la ligue de l'Île de France, décorée des Palmes académiques, Mme Jeanne Le Bey-Taillis fut avant tout la Présidente fondatrice du Cercle Caïssa. Elle passa la majeure partie de sa vie au développement des échecs en France. Elle aurait eu apparemment 89 ans, mais elle prit un malin plaisir tout au long de sa vie à dissimuler soigneusement son âge. Comme le disait si bien un de ses confrères, à vrai dire, elle n'avait plus d'âge depuis longtemps.

Au cours des 30 ans de règne sous la gouvernance de Mme Jeanne Le Bey-Taillis, le célèbre club installa provisoirement ses échiquiers à différents coins de la capitale.

(1) Xavier Tartacover naquit le 22 février 1887 à Rostov-sur-le-Don, en Russie. Il fit des échecs son métier, mais sa véritable passion demeura la poésie. Il fut à son apogée dans les années 1920-1935. Comme la majorité des grands joueurs de l'époque, il connut le succès à l'âge mûr. Il fut naturalisé Français le 16 décembre 1945. Il décéda le 4 février 1956 à Paris, France.
 
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J'ai mené une petite enquête au sujet du cercle Caïssa et j'ai découvert que sa création remontait à 1931 par Léonard Tauber, mécène et un des présidents de la FFE. Le bulletin de la FFE de février 1931 indique la création du Cercle Caïssa au 116 avenue des Champs-Élysées.
 
Bulletin de la FFE - février 1931

Le cercle est en fait un cercle privé comme on peut le voir toujours dans le bulletin de la FFE de décembre 1938.
 
Bulletin de la FFE décembre 1938 - Caïssa est un cercle privé, 6 rue de Presbourg. A noter que le cercle Les Échecs du Palais-Royal se trouve au Véfour, là où nous retrouverons Caïssa en 1943.
 
On trouve la trace du cercle Caïssa tout au long des années 1930 dans différentes chroniques d'échecs dans les journaux de l'époque. Je reproduis à la fin de cet article deux parties inédites que j'ai trouvées dans des journaux et qui ne me semblent pas avoir été déjà reproduites par ailleurs. La première est une partie d'Alekhine lors d'une grande simultanée à Paris contre des équipes en consultation en début d'année 1932 (3 à 4 joueurs en consultation par équipe). La partie Alekhine - Cercle Caïssa n'est pas une grande partie d'Alekhine comme vous pourrez le voir. La deuxième partie a été publiée dans l'Action Française du 27 mars 1933 et oppose deux grands noms des échecs français de l'époque lors d'un tournoi à Caïssa : Marcel Duchamp et François Le Lionnais.

Journal Excelsior - 30 janvier 1938 - Retronews.

On retrouve des noms célèbres à Caïssa, avec par exemple Capablanca pour un tournoi qu'il y remporte en 1938. 

Mais en décembre 1939, Gaston Legrain, chroniqueur d'échecs pour l'Action Française, signale que Caïssa est fermé. La guerre est proche, les restrictions commencent à arriver et jouer aux échecs devient compliqué. C'est sans doute à cette période qu'arrive Mme Jeanne Le Bey-Taillis qui sera présidente du Cercle Caïssa pour de très nombreuses années. Je vois deux hypothèses : soit un nouveau cercle portant le même nom "Caïssa" est créé, soit le cercle qui vient d'être fermé reprend vigueur grâce aux efforts de cette femme. J'ai une préférence pour la deuxième explication.
 
L'Action Française - 4 décembre 1939 - Retronews

Voici ce qu'écrit Jeanne Le Bey-Taillis dans le premier numéro de l’éphémère revue Caïssa en décembre 1943. Rappelons que la célèbre revue La Stratégie a alors disparu en 1940.
 
Caissa

Le Club Caïssa, tant par le nombre de ses adhérents que par la qualité de ses premiers échiquiers, a pris rapidement une importance et une autorité qui lui imposent dès maintenant de consacrer le meilleur de sa tâche au développement des échecs en France. 
 
Parmi les initiatives envisagées dans ce but, l'une des premières devait être assurément celle d'une importante revue périodique d'instruction et de propagande échiquéennes. Malheureusement les circonstances actuelles retardent la réalisation complète de ce projet. et cela est d'autant plus regrettable que le noble jeu des échecs voit chaque jour s'accroître le nombre de ses fidèles précisément au moment où les excellentes publications françaises qui existaient avant 1940 ont dû suspendre leur édition. 
 
Cependant quelques bulletins de Cercle ont courageusement reparu, et celui de la F.F.E., indispensable organe de liaison entre tous les Cercles de France, a repris sa féconde activité. Mais sa tâche est surtout d'ordre pratique et administratif, et un périodique exclusivement technique reste ardemment désiré et attendu par tous. 
 
C'est pour préparer cet avenir qu'au mieux des possibilités actuelles, Caïssa est heureux d'avoir pu établir, malgré tant de difficultés, une « Communication » de présentation provisoire à laquelle collaboreront les maîtres et les meilleurs joueurs, et il espère de tout cœur que ce premier effort lui vaudra l'approbation et la sympathie de tous les amis des échecs. 
 
J. LE BEY TAILLIS.
 

 
 
 

 
 
 
 

Journal Paris-Midi - 14 septembre 1941 - Retronews

Mme Jeanne Le Bey-Taillis se tient debout


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voici les deux parties dont je parlais précédemment.
Selon les navigateurs internet, il faudra éventuellement cliquer sur la flêche bleue pour passer à la partie suivante.
[Event "Paris Hotel Claridge"] [Site "?"] [Date "1932.02.28"] [Round "?"] [White "Alekhine, Alexandre"] [Black "Association Caissa"] [Result "1/2-1/2"] [ECO "D06"] [Annotator "Jean Olivier Leconte"] [PlyCount "78"] {Cette partie a été publiée sans commentaire dans le journal Excelsior du 20 mars 1932.} 1. d4 d5 2. c4 Nf6 3. cxd5 Qxd5 4. Nc3 Qd8 5. Nf3 e6 6. e4 Nbd7 7. Bd3 g6 8. Bf4 a6 9. Rc1 c6 10. Qd2 h5 11. O-O Ng8 {Les Noirs ont très mal joué le début de partie. Alekhine devait s'attendre à une victoire rapide...} 12. d5 Ndf6 13. dxc6 bxc6 14. Qe2 Bh6 15. Bxh6 Nxh6 16. Rfd1 Qa5 17. Nd4 Bd7 18. Nb3 Qe5 {Après un début de partie calamiteux, les noirs créent leur première menace avec Cg4.} 19. Bxa6 (19. h3 {Et les Noirs ont toujours une très mauvaise position.}) 19... Nhg4 {Soudain les Noirs commencent à menacer le Roi d'Alekhine} 20. g3 h4 21. f4 Qh5 22. gxh4 Qxh4 23. Rc2 Nxh2 24. Qxh2 Rxa6 25. Qxh4 Rxh4 26. Nc5 Ra7 27. Rdc1 Ke7 { Pour une raison qui m'échappe, les Noirs ne prennent jamais le pion en f4.} 28. Rh2 Rg4+ 29. Rg2 Rh4 {Une invitation à la partie nulle} 30. a4 Ng4 31. Rg3 e5 32. f5 Bc8 33. b4 gxf5 34. exf5 Ba6 35. Rf3 Nf6 36. Re3 Rxb4 37. Rxe5+ Kd6 38. Nxa6 $4 (38. Ree1 {était le seul coup, avec par exemple} Kxc5 39. Nb5+) 38... Rxa6 $4 ({Le coup intermédiaire} 38... Rg4+ $1 {mettait Alekhine face à des difficultés insurmontables} 39. Kf2 Kxe5 {Les Noirs ont de bonnes chances de gagner la partie}) 39. Ree1 Rg4+ {Partie nulle. Une mauvaise partie d'Alekhine...} 1/2-1/2 [Event "Cercle Caissa"] [Site "?"] [Date "1932.??.??"] [Round "?"] [White "Duchamp, Marcel"] [Black "Le Lionnais, Francois"] [Result "0-1"] [ECO "A10"] [Annotator "Francois Le Lionnais"] [PlyCount "94"] {Partie publiée dans le journal "L'Action Française" du 27 mars 1933, chronique de Gaston Legrain. Les commentaires sont de François Le Lionnais.} 1. c4 c5 2. Nc3 Nc6 3. g3 g6 4. Bg2 Bg7 5. d3 d6 6. e4 f5 7. Nge2 Nf6 8. O-O O-O 9. Rb1 Bd7 10. Bg5 {Pour échanger le Fou par Dd2 et Fh6, mais cette avance va provoquer un emprisonnement du Fou puis la dislocation du roque.} Ng4 11. h3 Nge5 12. f4 {Il est nécessaire de chasser le Cavalier qui attaque le pion en d3.} Nf7 13. exf5 {Pare la menace h6 puis g5} Nxg5 14. fxg5 Bxf5 15. g4 Bd7 16. Ne4 Rb8 17. Qd2 Nd4 { Intensifiant l'action des deux fous noirs.} 18. Nf4 Bc6 19. Nd5 a5 ({Les Blancs ne craignent pas le doublement des pions après} 19... Bxd5 {car leur fou s'installerait ensuite en e4 pour établir une liaison solide des deux pions isolés.}) ({Si} 19... b5 20. b4) 20. Rxf8+ Qxf8 21. Rf1 (21. Qxa5 Bxd5 22. cxd5 Nf3+ {et mat rapide}) 21... Qd8 22. Kh1 Be5 23. Qe3 {Menace de gagner le pion en c5 et de dominer la colonne "f" par Df2} b5 {Les Noirs dédaignant ces deux menaces, cherchent le gain par la colonne "b"} 24. Nxc5 bxc4 25. dxc4 Rxb2 26. Ne4 Bxd5 27. cxd5 Rxa2 {Après avoir gagné un pion du côté Dame, les Noirs vont travailler sur la colonne "e".} 28. Nd2 a4 29. Nc4 Re2 30. Qd3 Bg7 31. h4 Qc8 {Pivot de la manoeuvre qui suit.} 32. Rf4 Re1+ 33. Kh2 Nb3 34. h5 Qc5 {Menace Dg1 suivi de Fe5 et gagne} 35. Bf1 gxh5 36. gxh5 Re5 37. Rf5 ( 37. h6 $2 Rxg5 38. hxg7 Qg1+ {et mat ensuite}) 37... Rxf5 38. Qxf5 Nd4 39. Qe4 a3 {Toute la tactique des Noirs consistent à se réserver le temps d'avancer douvement le pion "a" en faisant le nécessaire sur l'aile Roi.} 40. Bd3 Nf3+ { Les Blancs doivent accepter ce sacrifice qui n'a pour but que la déviation de la Dame.} 41. Qxf3 a2 42. g6 hxg6 43. Bxg6 Bf6 44. Qg2 a1=Q 45. Bh7+ Kxh7 46. Qg6+ Kh8 47. Qe8+ Kg7 0-1

samedi 15 juillet 2023

L’arrivée d’Alekhine en Europe occidentale

Guy Gignac (Québec) m’a envoyé des photos d’une lettre manuscrite d’Alekhine qu’il vient d’acquérir.
Cette lettre, datée du 6 février 1922, a été écrite sur du papier à entête de La Régence !
Merci à Guy pour ce document, mais également merci à Oliver Sheppard pour la transcription et la traduction de la lettre écrite en anglais de la main d’Alekhine.
 




C’est l’occasion pour moi de faire un article qui explique le contexte de cette lettre, avec l’arrivée d’Alekhine en Europe occidentale qui fuit la Russie Soviétique. Pour cela je me suis appuyé essentiellement sur le livre en russe de Youri Shabourov « Alekhine » (Moscou 2001 – Collection « La vie des gens exceptionnels »). A ma connaissance ce livre très complet sur la vie d’Alekhine n’a pas été traduit dans une autre langue.
 
 
Vous avez ci-dessous le texte en anglais de la lettre puis sa traduction en français. Oliver indique que celle-ci est rédigée dans un anglais impeccable. La question est de savoir si c’est Alekhine lui-même qui l’a rédigée ou bien s’il a été aidé par Mongredien cité dans la lettre (et demeurant à l’époque en France). 
 
Dictionnaire des échecs - François le Lionnais et Ernst Maget - Paris 1967
 
Le Mongredien dont il est question est Alfred Wornum Mongredien (1877-1954), petit fils d’Augustus Mongrédien (lui-même fils d’un réfugié de la Révolution Française) qui joua un match à Paris en 1859 contre Morphy et fut notamment président du London Chess Club de 1839 à 1870. Au sujet d’Alfred Mongredien, le dictionnaire des échecs de François le Lionnais et Ernst Maget (Paris 1967) indique qu’il était problémiste et habitait en France.
 
Le destinataire de la lettre Philip W. Sergeant

La lettre est expédiée vers Londres à destination de Philip Walsingham Sergeant (1872-1952) personnage influent des échecs britanniques de l’époque et écrivain prolifique sur le jeu d’échecs.
Un important évènement échiquéen est organisé durant l’été 1922 à Londres. Il s’agit du 17ème congrès des joueurs d’échecs britanniques, prévu du 11 juillet au 19 août 1922.

Paris, 6/II 1922

Dear Sir,
Mr Mongredien has kindly mentionned your name to me as being in a position to assist me in finding a good Englisch representative to act for me both before and during my approaching (in March) visit to your country.
I need someone to arrange fixtures for me to do the necessary publicity work and generally to assist me in making my visit a success both to myself and the public.
If you are disposed to undertake this will you kindly let me know as soon as possible indicating at the same time your conditions.
My idea is to pay a percentage on all receipts, this to cover both services and incidental expenses.
If you are not inclined to undertake the work, perhaps you can recommend someone else. Naturally I need someone with the necessary spare time and ability, someone well known in English chess circles in whom I can place the fullest confidence.
Awaiting your reply
I am yours truly
Alexander Aljechin

My adress here is: Paris/XVI/
27 rue La Fontaine, M.
Victor Kahn pour A.A.
(villa Patrice Boudart)

Mr PW Sergeant
City of London Chess Club
(near St-Pauls Cathedral)
London
Angleterre

8 Lodge Rd
St Johns Wood
NW8


Oliver signale trois petites fautes dans la lettre rédigée en anglais :
- Englisch au lieu d'English en page 1 de la lettre
- address (s'écrit avec 2 "d" en anglais) en page 3 de la lettre
- villa Boudard s’écrit avec un "d" et non pas un "t", en page 3 de la lettre

Voici le texte traduit en français par Oliver

Paris, 6/II 1922

Cher Monsieur,

M.Mongredien m'a aimablement suggéré votre nom comme étant en mesure de m'aider à trouver un bon représentant Anglais pour agir pour moi avant et durant ma prochaine visite (en mars) dans votre pays. Il me faut quelqu'un qui puisse organiser des rencontres, faire le travail nécessaire de publicité et de façon générale m'assister pour faire de ma visite un succès tant pour moi que pour le public.
Si vous étiez disposé à entreprendre cela, voudriez vous m'en informer dès que possible, en me faisant part de vos conditions.
Mon idée est de payer un pourcentage sur toutes les recettes, ceci afin de couvrir à la fois les services et les coûts induits.
Si vous n'étiez pas enclin à prendre en charge ce travail, peut-être pourriez-vous me recommander quelqu'un d'autre. Naturellement, j'ai besoin de quelqu'un disposant du temps nécessaire et des compétences requises, quelqu'un de bien connu parmi les cercles d'échecs anglais, en qui je puis avoir toute confiance.
Dans l'attente de votre réponse,
Sincèrement votre,

Alexander Aljechin

Mon adresse ici est : Paris/XVI/
27, rue La Fontaine, M.
Victor Kahn pour A.A.
(villa Patrice-Boudart)


Il faut noter que l’adresse où se trouve hébergée Alekhine existe toujours et elle se trouve dans un quartier bourgeois de Paris. Il passe son séjour à Paris chez Victor Kahn, russe d'origine et futur champion de France d'échecs en 1934.
 
Villa Patrice Boudart dans le 16ème arrondissement de Paris

Alekhine est donc à Paris au moment de la rédaction de ce courrier. Le 15 mars 1922 il donnera une simultanée à l’aveugle au Café de la Rotonde. J’ai d’ailleurs consacré un article de ce blog à ce évènement.

Mais revenons quelques temps en arrière. Après avoir été juge d’instruction pour le MOUR (Département des enquêtes criminelles de Moscou - МУР Московский уголовный розыск) dans l’agitation de la Russie post révolutionnaire (Alekhine a suivi des études de droit), Alekhine occupe en 1920 un poste de traducteur pour le Komintern. C’est là qu’Alekhine rencontre sa deuxième femme, Annalisa Ruegg (1879 – 1934). Cette dernière est suisse et journaliste. C’est une femme intelligente qui parle trois langues, anglais, français et allemand. Une petite femme charmante et énergique.

Annalisa Ruegg - Photo du livre de Youri Shabourov

Durant l’hiver 1920 / 1921, le Komintern organise un voyage à travers la Russie pour les correspondants étrangers et Alekhine les accompagne en tant que traducteur. C’est probablement à cette occasion qu’il se rapproche d’Annalisa Ruegg. Ils se marient le 15 mars 1921. Elle a alors 42 ans, et Alekhine seulement 29 ans. Ce dernier a toujours eu une attirance pour les femmes plus âgées que lui !
 
Alekhine à gauche lors du voyage de la délégation du Komintern en Russie (hiver 1920 - 1921).
Photo du livre de Youri Shabourov
 
Alekhine (flêche rouge) lors du voyage de la délégation du Komintern en Russie (hiver 1920 - 1921). 
Photo du livre de Youri Shabourov

5 semaines après leur mariage, le commissariat du peuple aux affaires étrangères ne voit pas d’obstacle pour qu’Alekhine et son épouse se rendent en Lettonie. C’est un peu inespéré pour Alekhine qui a été arrêté à plusieurs reprises par la Tcheka et est passé à deux doigts de la mort à Odessa. Ce sera le point de départ de la Russie pour Alekhine et il n’y remettra jamais plus les pieds. 
 
Article de l'Action Française par Gaston Legrain, le 14 mai 1922 - Retronews
 
Ce départ est donc précipité, Alekhine emporte avec lui seulement deux valises pour ses affaires, mais il prend avec lui le vase offert par le Tsar Nicolas II pour sa victoire à 16 ans au tournoi de Saint-Pétersbourg en 1909 lors du tournoi amateur de toute la Russie (en parallèle du tournoi de maitres remporté par Rubinstein).
 
Alekhine (16 ans) en 1909 lors de sa victoire au tournoi des amateurs de Saint-Pétersbourg.
On distingue nettement le vase offert par le Tsar Nicolas II :-) 

Le couple arrive à Riga le 11 mai 1921. Alekhine donne dans la ville deux simultanées le 13 et le 20 mai 1921. Puis ils partent vers Berlin en juin 1921 où il jouera un match contre Teichman. Là le couple se sépare, Annalisa se dirige vers Winterthur en Suisse tandis qu’Alekhine a soif du jeu d’échecs et commence à enchainer les tournois. En fait son épouse est enceinte et donnera naissance à leur fils, également appelé Alexandre Alekhine, le 2 novembre 1921.
 
Alekhine et son fils à Zurich en 1926. 
Photo du livre de Youri Shabourov
 
Lors d’un entretien qu’il a eu avec le fils d’Alekhine, Youri Shabourov ajoute quelques précisions. Annalisa tenta de s’installer à New-York avec son fils, mais elle fut expulsée à cause de ses idées politiques. Elle décèdera le 2 mai 1934 à Lausanne. Leur fils n’a que 13 ans au moment de la mort de sa mère. Alekhine le verra peu, mais il envoyait régulièrement des fonds à la famille qui avait accueilli son fils. Ce dernier se souvenait être venu seulement une fois à Paris, rue de la Croix-Nivert où Alekhine avait son domicile parisien dans les années 1930. Le fils d’Alekhine deviendra ingénieur, mais ne s’intéressait pas aux échecs et n’a pas laissé de descendance.

Revenons à Alekhine lui-même. Dans cette deuxième partie de l’année 1921, il enchaine les tournois à travers l’Europe. 1er prix au tournoi de Tribert (Allemagne) en juillet 1921, 1er prix au tournoi de Budapest en septembre 1921, 1er prix au tournoi de la Hague en octobre 1921.
Puis il arrive à Paris en janvier 1922 et nous sommes au moment où il écrit la lettre dont il est question au début de l’article. D’ailleurs il ne reste que quelques mois à Paris, car dès avril 1922 nous retrouvons Alekhine au tournoi de Pystian (Slovaquie) où il se classera 2ème derrière Bogolioubov.

Le congrès des échecs britanniques auquel Alekhine va participer est important car c’est l’occasion pour lui de se mesurer au champion du Monde de l’époque, le cubain José Raul Capablanca. Capablanca remportera d’ailleurs le tournoi avec 13 sur 15, Alekhine étant deuxième avec 11,5 sur 15, les deux joueurs restant invaincus.
 
Excelsior - 21 août 1922 - Retronews.
 
C’est d’ailleurs lors de ce tournoi de Londres que fut rédigé un important document au sujet du championnat du monde d’échecs (la FIDE n’existe pas encore). Ce document sera signé par Capablanca, Alekhine, Vidmar, Bogolioubov et Rubinstein.
Les grandes lignes de cet accord de Londres stipulent que le match pour le titre de champion du Monde correspond à un match en 6 victoires, les nulles ne comptant pas. Le champion du Monde n’est pas obligé de défendre son titre si la bourse apportée par le challenger est inférieure à 10000 USD (environ 182.000 USD actuels). Le champion du Monde touche de base 20% des fonds, puis le reste est partagé à hauteur de 60% pour le vainqueur et 40% pour le perdant.
 
Caricature d'Alekhine au tournoi de Londres en 1922.
Image tirée du livre sur Alekhine "Le Sphinx Russe" par Sergei Vonronkov

Alekhine restera en Angleterre au moins jusqu’en septembre 1922 où il remportera le tournoi d’Hastings.
A cette occasion il jouera une partie contre Bogolioubov que Kasparov cite comme un des plus beaux chefs-d’œuvre du jeu d’échecs (voir sur l'échiquier interactif à la fin de cet article).
 
Alekhine est alors bien lancé dans sa quête pour le titre mondial.
 
Excelsior 19 octobre 1922 – A noter que le dernier mot de l’article tue l’article pour un joueur d’échecs :-)

Les manies des joueurs d'échecs 

Les plus notoires pousseurs de bois se sont réunis, on le sait, il n'y a guère, à Hastings. Les manies des maîtres de l'échiquier sont peut-être aussi intéressantes à observer que leur jeu lui-même... surtout pour le commun des spectateurs, peu versés dans la science périlleuse des échecs.

Au reste le public paraissait s'intéresser vivement aux gestes des joueurs. Alekhine, ce jeune Russe, que nombre de spécialistes considèrent comme le plus proche rival de Capablanca, Alekhine se tient debout pendant que joue son adversaire. Il observe le nouveau coup... puis il fait un petit tour et jette un regard sur les autres jeux.

Le moment est-il venu de riposter? Il saisit entre ses doigts une de ses boucles blondes — c'est le seul blond parmi les joueurs d'Hastings. Il roule nerveusement la volute de cheveux : c'est sa manière de réfléchir. Avec ses cheveux courts et, noirs, Rubinstein, le maître polonais, offre un contraste très marqué avec Alekhine.

Assis. Rubinstein se balance constamment de droite à gauche, un peu à la manière d'un éléphant, précisent quelques spectateurs. Quand il n'étudie pas son jeu ou celui de ses rivaux, il arpente la pièce d'un pas alerte. En souriant il rejoint ses deux mains derrière la tête. Et ces gestes insignifiants sont avidement épiés et commentés par les spectateurs de ces batailles pacifiques qui ont pour champ un damier.

 




[Event "Hastings Six Masters"] [Site "Hastings"] [Date "1922.09.21"] [Round "10"] [White "Bogoljubow, Efim"] [Black "Alekhine, Alexander"] [Result "0-1"] [ECO "A84"] [Annotator "Alekhine/Kasparov"] [PlyCount "106"] [EventDate "1922.09.10"] [EventType "tourn"] [EventRounds "10"] [EventCountry "ENG"] [SourceTitle "HCL"] [SourceDate "1999.07.01"] [SourceVersion "2"] [SourceVersionDate "1999.07.01"] [SourceQuality "1"] {[%evp 0,106,31,18,74,45,35,35,35,42,46,39,28,32,31,31,28,33,29,2,74,11,10,4, 19,-7,13,-50,1,0,22,17,28,-56,-65,-95,-95,-112,-112,-111,-111,-111,-106,-122, -120,-124,-125,-134,-151,-194,-197,-194,-194,-194,-186,-195,-175,-208,-223, -286,-322,-322,-371,-371,-414,-436,-421,-418,-421,-429,-444,-452,-275,-283, -275,-291,-280,-289,-311,-298,-298,-338,-336,-362,-371,-413,-418,-433,-390, -384,-384,-418,-418,-418,-418,-466,-340,-704,-942,-942,-1103,-1285,-1260,-1260, -1260,-1319,-1311,-1418,-1276]} 1. d4 {[%mdl 1] Cette partie a été publiée dans de nombreux livres dont les meilleures parties d'Alekhine.} f5 {Alekhine : "Une défense audacieuse que je n'utilise que dans des cas exceptionnels. Dans cette partie, pour avoir une chance de remporter le premier prix, je devais absolument jouer pour gagner, alors que mon adversaire aurait pu se contenter de la nulle pour obtenir la troisième place. Je devais donc chercher à rendre le jeu plus difficile".} 2. c4 Nf6 3. g3 {Alekhine : "Dans la partie hollandaise, il est préférable pour les Blancs de fianchetter le Fou avant c4, sinon les Noirs peuvent échanger leur Fou royal -- une pièce très peu utile dans cette ouverture".} e6 4. Bg2 Bb4+ 5. Bd2 Bxd2+ 6. Nxd2 {Alekhine : "Il était préférable de prendre la dame et de jouer Cc3".} Nc6 7. Ngf3 O-O 8. O-O d6 9. Qb3 {Alekhine : "Cette manœuvre n'empêche pas les Noirs de réaliser son plan ; mais il est déjà difficile de trouver une bonne idée pour les Blancs".} Kh8 10. Qc3 e5 11. e3 ({Alekhine : "Si} 11. dxe5 {alors} dxe5 12. Nxe5 $2 Nxe5 13. Qxe5 Qxd2) 11... a5 {Alekhine : "Comme on le verra bientôt, il était très important de ne pas autoriser temporairement le coup b4".} 12. b3 ({Alekhine : "Mais pas} 12. a3 {à cause de} a4) 12... Qe8 13. a3 Qh5 {Alekhine : "Maintenant, les Noirs passe à l'attaque. ....} 14. h4 { Alekhine : "Un bon coup de défense qui donne au Cavalier f3 une case de repli et renouvelle la menace dxe5".} ({.... Les Blancs ne peuvent pas jouer} 14. dxe5 dxe5 15. Nxe5 Nxe5 16. Qxe5 {à cause de} Ng4 {et gagne}) ({Ni} 14. b4 $2 e4 15. Ne1 axb4) 14... Ng4 15. Ng5 {Alekhine :" pour chasser le cavalier par f3, les blancs affaiblissent encore plus leur pion.} (15. b4 {aurait sans doute été préférable".}) 15... Bd7 16. f3 ({Alekhine : "Si} 16. Bxc6 {alors } Bxc6 17. f3 exd4 18. fxg4 dxc3 19. gxh5 cxd2 {à l'avantage des noirs".}) 16... Nf6 17. f4 {Alekhine : "Est déjà à cause de la menace 18. ... f4 nécessaire".} e4 18. Rfd1 {Alekhine : "Pour couvrir le pion g3 dans le cas où il serait menacé par Dg4 et Ch5 avec le Cavalier depuis f1. Le temporaire 18. d5 ! donnait cependant aux Blancs de plus grandes chances de défense".} h6 19. Nh3 d5 {Alekhine : "Par ce coup, les Noirs détruisent toutes les chances adverses au centre et, de manière inattendue, passent à l'attaque sur l'aile dame".} 20. Nf1 Ne7 21. a4 Nc6 22. Rd2 Nb4 23. Bh1 {Alekhine : "Le fait que les Blancs doivent recourir à des manœuvres aussi incroyables pour consolider d'une manière ou d'une autre leur aile-roi prouve mieux que tout autre la difficulté de leur position".} Qe8 {Alekhine : "Un coup très fort qui apporte de nouveaux avantages aux Noirs ; soit la possession de la case d5 après cxd5 ; soit l'ouverture des lignes de l'aile dame par b6 après c5, soit, enfin, la prise de pions comme dans la partie".} 24. Rg2 {Alekhine : "Les Blancs souhaitent maintenant obtenir g4, mais même cette faible chance est irréalisable".} dxc4 25. bxc4 Bxa4 26. Nf2 Bd7 27. Nd2 b5 {Alekhine : "Pour la possession des cases centrales, une lutte s'engage maintenant, qui conduit à des situations très originales".} 28. Nd1 {Kasparov : La position des Blancs semble assez terrible : Il a un pion en moins et les pièces ont à peine le temps de respirer.} Nd3 $1 {Alekhine : "Prépare la combinaison suivante. Une mauvaise décision serait bxc4, car dans ce cas le Cavalier c4 se serait installé en e5". Kasparov : Alekhine ne permet évidemment pas à l'adversaire d'avoir l'activité tant attendue. Maintenant, les Blancs récupèrent leur pion, mais leurs forces sont condamnées à être détruites dans leur propre camp.} ({Mais après la tentative primitive} 28... bxc4 29. Nxc4 Nfd5 30. Qa3 {la coordination des pièces blanches est en grande partie rétablie, et en plus le pauvre cavalier obtient une jolie place en e5.}) 29. Rxa5 ({ Alekhine : "Si} 29. cxb5 {alors} Bxb5 30. Rxa5 Nd5 31. Qa3 (31. Rxa8 Qxa8 32. Qb3 Ba4 {etc.}) 31... Rxa5 32. Qxa5 Qc6 {avec une forte attaque".}) 29... b4 30. Rxa8 ({Alekhine : "Si} 30. Qa1 {alors} Rxa5 31. Qxa5 Qa8 32. Qxa8 Rxa8 { et la pénétration de la tour noire dans le camp ennemi décide de la partie". }) 30... bxc3 $3 {Alekhine : "Comme il ressort de ce qui suit, cette suite est beaucoup plus forte que ....} ({....} 30... Qxa8 31. Qb3 (31. Qc2 Ne1) 31... Ba4 {Et Blanc pourrait encore se défendre".} ({Kasparov :} 31... Qa1 32. Qb1 Ra8 {aurait forcé un abandon rapide par les Blancs. Mais Alekhine ne s'est pas contenté de cette conclusion prosaïque. Il voulait créer quelque chose d'immortel !}) 32. Qb1 {et les Blancs pourraient encore se défendre".}) 31. Rxe8 c2 {Alekhine : " La clé de la combinaison commencée au 27ème coup ".} 32. Rxf8+ Kh7 {[#] Kasparov : La tour blanche, qui était initialement en a1, peut être fière : elle a capturé la dame noire et les deux tours. Mais le modeste petit pion de b7 réduit à néant cet exploit. Des générations de joueurs d'échecs ont apprécié cette position époustouflante.} 33. Nf2 {Alekhine : "Forcé".} c1=Q+ 34. Nf1 Ne1 $1 { Alekhine : "Menace d'un mat étouffé inattendu". La menace n'est ni plus ni moins que Cf3#.} 35. Rh2 Qxc4 { Alekhine :" une nouvelle menace de mat en quelques coups par 36. Fb5 etc. oblige les Blancs à sacrifier la qualité. Kasparov : L'attaque ne s'arrête tout simplement pas - dans un instant, le fou noir, candidat à la mort en b5, interviendra aussi de manière décisive dans l'action.} 36. Rb8 {Kasparov : La seule défense.} Bb5 37. Rxb5 Qxb5 38. g4 {Alekhine : "Forcé, car après 40. g5 les noirs auraient obtenu deux pions libres par Cg4 etc.". Pour un moment, une lueur d'espoir pour le pauvre fou en h1.} Nf3+ 39. Bxf3 exf3 40. gxf5 Qe2 $1 {Alekhine : "Ce coup crée une situation problématique : les Blancs ne peuvent pas déplacer une pièce sans perdre immédiatement, .... Kasparov : Forcer le trait ! Les pièces blanches ne peuvent plus se déplacer du tout, par exemple 41.Th3... Zugzwang!} 41. d5 ({....} 41. Rh3 Ng4 $1 ) ({.... ou bien} 41. Nh3 Ng4 $3 {et les Noirs gagnent.} 42. Rxe2 fxe2 {et une nouvelle dame noire fait son apparition.}) 41... Kg8 42. h5 Kh7 {Un signe de force.} 43. e4 Nxe4 44. Nxe4 Qxe4 {Kasparov : et les noirs ont facilement gagné la partie.} 45. d6 {Alekhine : "Apparemment, les pions ne sont plus défendables".} cxd6 46. f6 gxf6 47. Rd2 Qe2 {Alekhine : "Une conclusion élégante, digne de la partie. Les noirs forcent une finale de pions gagnée".} 48. Rxe2 fxe2 49. Kf2 exf1=Q+ (49... e1=Q+ 50. Kxe1 Kg7 51. Kf2 Kf7 52. Ke3 Ke6 53. Ke4 d5+) 50. Kxf1 Kg7 51. Kf2 Kf7 52. Ke3 Ke6 53. Ke4 d5+ {Alekhine : L'une des plus belles parties que j'ai jamais jouées.} 0-1

samedi 17 décembre 2022

Traité complet théorique et pratique sur les fins de parties

M. Guy Gignac a fait l'acquisition du livre de Jean Préti "Traité complet théorique et pratique sur les fins de parties" datant de 1858.
 
Source Gallica - BNF.

Mais l'exemplaire qu'il a acquis est tout à fait exceptionnel par un détail formidable : il s'agit de l'exemplaire que possédait Saint-Amant comme le montre la dédicace de Jean Préti à son intention au début de l'ouvrage. M. Guy Gignac m'a envoyé une photo de cette dédicace et je l'en remercie.
 
Un détail qui rend l'exemplaire de Guy Gignac unique.
La dédicace de Jean Préti à Saint-Amant : "A Monsieur St Amant témoignage de haute estime et d'admiration de la part de l'auteur".

C'est l'occasion pour moi de dire quelques mots sur ce livre d'échecs, qui a été numérisé par la BNF et qui est disponible en ligne, par exemple ici.

Je me suis intéressé à la liste des souscripteurs, ainsi qu'à deux positions qui sont données à la fin de l'ouvrage.

On retrouve dans la liste des souscripteurs tous le gratin des joueurs d'échecs qui fréquentent pour la plupart le nouveau Café de la Régence ouvert en 1855 au 161 rue Saint-Honoré. Sur cette première page on remarque notamment Jules Arnous de Rivière, Albert Clerc, Ignace Calvi pour ne citer qu'eux.
 
Sur cette deuxième page de souscripteurs, je retiens Harrwitz, adversaire malheureux du futur match contre Morphy, le comte Isoard Vauvenargues un des protagonistes de la partie de l'opéra avec Morphy, ou bien encore Alfred de Musset en bas de page (décédé le 2 mai 1857 et qui n'aura donc pas eu l'occasion de voir le livre, mais qui confirme bien sa passion du jeu d'échecs jusqu'à la fin de sa vie).
 
Sur cette troisième et dernière page des souscripteurs, on observe la présence de Saint-Amant, de son vainqueur de 1843, Howard Staunton, et Claude Vielle, ancien propriétaire de la Régence.
 
A la fin du livre on trouve donc la position de la 25ème partie entre McDonnell et La Bourdonnais jouée à Londres en 1834, ainsi que la "toujours jeune" en français (evergreen game) c'est-à-dire la magnifique combinaison de mat d'Anderssen contre Dufresne jouée à Berlin en 1852. Je donne cette dernière partie avec les commentaires de Kasparov pour Chessbase magazine.
 
Diagramme de la 25e partie des matchs entre McDonnell et La Bourdonnais - Londres 1834
Un commentaire de Jean Préti précise qu'après le 24ème coup des noirs : 
 
Des témoins de cette partie, jouée à Londres, nous ont assuré qu'arrivé à ce dernier coup du Pion poussé par le joueur français, il y eut comme un mouvement d'enthousiasme électrique dans l'assemblée d'élite qui assistait à cette lutte de géants, quand elle put apprécier toutes les conséquences de cette sublime combinaison.
 
Extrait de la partie Anderssen - Dufresne, Berlin 1852.
 

 

 


[Event "Berlin 'La toujours jeune'"] [Site "Berlin"] [Date "1852.??.??"] [Round "?"] [White "Anderssen, Adolf"] [Black "Dufresne, Jean"] [Result "1-0"] [ECO "C52"] [Annotator "Kasparov,G"] [PlyCount "47"] [EventDate "1852.??.??"] [EventType "game"] [EventRounds "1"] [EventCountry "GER"] [SourceTitle "CBM 059"] [Source "ChessBase"] [SourceDate "1997.08.01"] [SourceVersion "1"] [SourceVersionDate "1997.08.01"] [SourceQuality "1"] {Aujourd'hui, nous allons nous pencher sur une partie qui a enchanté ses contemporains et qui est entrée dans l'histoire sous le nom de "la toujours jeune" en français ("Evergreen Game" en anglais). Dufresne était un étudiant en droit et journaliste allemand, dont le "Petit manuel du jeu d'échecs" ( "Kleines Lehrbuch des Schachspiels") a accompagné des générations entières de joueurs d'échecs.} 1. e4 e5 2. Nf3 Nc6 3. Bc4 Bc5 4. b4 Bxb4 5. c3 Ba5 6. d4 exd4 7. O-O d3 8. Qb3 Qf6 9. e5 Qg6 10. Re1 Nge7 11. Ba3 b5 12. Qxb5 Rb8 13. Qa4 Bb6 14. Nbd2 Bb7 15. Ne4 Qf5 16. Bxd3 Qh5 {[#] Les blancs ont un avantage gigantesque, le temps est venu de donner l'assaut. Fidèle à son propre style romantique et obéissant au goût du public, Anderssen a joué} 17. Nf6+ {?!! Deux points d'exclamation, car l'une des combinaisons les plus brillantes de toute l'histoire des échecs a été initiée par ce coup. Mais objectivement, la recherche de la beauté peut créer des complications inutiles. Le prosaïque} (17. Ng3 Qh6 18. Bc1 Qe6 19. Bc4 Nd5 (19... Qg6 20. Nh4 Qg4 21. Bxf7+) 20. Ng5 Qg4 21. Re4 {aurait terminé la partie sans plus de difficultés. Mais il manquerait ainsi aujourd'hui un joyau à la couronne du jeu d'échecs.}) 17... gxf6 18. exf6 Rg8 $1 {A première vue, la ligne g ouverte offre aux noirs d'excellentes chances de contre-attaque. Mais les calculs d'Anderssen étaient au-delà des craintes des gens normaux.} 19. Rad1 $1 {Je vous épargnerai les innombrables analyses de générations de joueurs d'échecs. Après des débats sans fin, ils ont décidé que le coup d'Anderssen était meilleur que l'alternative 19.Fe4. Après cela, 19...Tg4 ! serait le meilleur coup. Les Blancs auraient quelques problèmes difficiles à surmonter, mais à mon avis, ils gardent clairement le dessus dans les complications sauvages qui suivent.} Qxf3 $2 {Aujourd'hui, le roi blanc est à deux doigts d'être exécuté. Mais pouvons-nous reprocher à Dufresne de ne pas avoir reconnu les capacités magiques d'un génie ? [#]} 20. Rxe7+ $1 Nxe7 $5 {Une preuve de plus que les chefs-d'œuvre des échecs nécessitent la coopération courageuse de la victime ! De nos jours, un professionnel des échecs -- et bien sûr un ordinateur jouant aux échecs -- choisirait sans hésiter le coup 20...Rd8 pour éviter l'anéantissement imminent.} (20... Kd8 {Mais les noirs perdent aussi ainsi :} 21. Rxd7+ $1 Kc8 ( 21... Kxd7 22. Bf5+ Ke8 23. Bd7+ Kd8 24. Bxc6+ {with mate nebst Matt.}) 22. Rd8+ $1 Kxd8 (22... Rxd8 23. gxf3 {or}) (22... Nxd8 23. Qd7+ $3 {- the same motif mit dem gleichen Motiv}) 23. Be2+ {less clear is} ({weniger klar ist} 23. Bf5+ Qxd1+ 24. Qxd1+ Nd4 25. g3 Rg5 $1 26. Bh3 Bf3 $1) 23... Nd4 24. Bxf3 Bxf3 25. g3 Bxd1 26. Qxd1 {avec une finale ennuyeuse mais gagnée.}) 21. Qxd7+ $3 Kxd7 22. Bf5+ Ke8 23. Bd7+ Kf8 24. Bxe7# {Il n'est pas étonnant que les joueurs d'échecs de l'époque aient été peu enclins à apprendre des règles stratégiques obtuses face à des parties d'attaque aussi grandioses. Mais la vieille école combinatoire, menée par son chevalier le plus brillant, Anderssen, était finalement condamnée à disparaître. Ses représentants n'ont pas pu résister longtemps aux techniques plus avancées d'un Paul Morphy, dont les coups tactiques avaient une base positionnelle beaucoup plus solide.} 1-0 [Event "Match Londres 1834"] [Site "London"] [Date "1834.??.??"] [Round "18"] [White "McDonnell, Alexander"] [Black "De La Bourdonnais, Louis Charles Mahe"] [Result "0-1"] [ECO "C33"] [PlyCount "60"] [EventDate "1834.06.??"] [EventType "match"] [EventRounds "25"] [EventCountry "ENG"] 1. e4 e5 2. f4 exf4 3. Bc4 Qh4+ 4. Kf1 g5 5. Nc3 Bg7 6. d4 Nc6 7. e5 Nge7 8. Nf3 Qh5 9. Ne4 h6 10. Nf6+ Bxf6 11. exf6 d5 12. Bd3 Nf5 13. Qe1+ Kd8 14. Ne5 Nfxd4 15. c3 Nxe5 16. Qxe5 Nc6 17. Qxd5+ Ke8 18. Bb5 Be6 19. Bxc6+ Kf8 20. Qc5+ Kg8 21. Bf3 Qg6 22. Qd4 c5 23. Qe5 Re8 24. Be2 f3 {Des témoins de cette partie, jouée à Londres, nous ont assuré qu'arrivé à ce dernier coup du Pion poussé par le joueur français, il y eut comme un mouvement d'enthousiasme électrique dans l'assemblée d'élite qui assistait à cette lutte de géants, quand elle put apprécier toutes les conséquences de cette sublime combinaison.} 25. Kf2 fxe2 26. Be3 b6 27. h4 Bd7 28. Qd5 Qxf6+ 29. Kxe2 Bg4+ 30. Kd2 Rd8 {The Chess Player's Chronicle 1841, p. 311} 0-1