Voici un témoignage sur le Café de la Régence vers 1870. Dans la préface de ce guide, l’auteur, Adolphe Joanne, indique que cette troisième édition était prête en 1870, mais un événement chamboula ses projets :
« Cette troisième édition de Paris illustré, qui avait coûté plus d’une année de travail, était sous presse lorsque l’empereur Napoléon III déclara la guerre à la Prusse. »
Aussi il est difficile de savoir quand l’article sur le Café de la Régence a été rédigé. Est-ce sous Napoléon III ? Juste après la guerre et la Commune ?
Un élément peut nous éclairer : il est fait mention de la présence de Neumann. Le très fort joueur d'échecs Gustav Neumann quitte Paris en 1870 quand les bruits de bottes se font entendre. Et pour cause, Neumann est prussien.
Gustav Neumann
Mais l’article est intéressant, car il livre quelques détails pratiques sur l’organisation des parties dans le Café. Et une petite phrase, qui semble anodine, donne le ton au sujet de Paul Morphy.
Ce dernier est forcément français et cela rejoint le ton de cet article de la revue La Stratégie.
PARIS ILLUSTRE en 1876
Guide de l’étranger et du parisien
Par Adolphe Joanne – Paris, 3ème édition
Le livre se trouve sur le site Gallica.
LES ÉCHECS
Paris est peut-être, après Londres, la ville où les échecs sont l’objet du culte le plus passionné, ce qui tient sans doute à cette particularité qu’il a été le théâtre des exploits des quatre plus grands joueurs qu’aient vus naître le XVIIIème et le XIXème siècle : Danican-Philidor, Deschapelles, Mahé de La Bourdonnais et Morphy, Français, celui-ci d’origine, et les trois premiers de naissance.
Les professeurs, leurs élèves et les amateurs se réunissent au café de la Régence (161, rue Saint-Honoré), et s’y livrent à des luttes émouvantes auxquelles assiste une nombreuse galerie, depuis midi jusqu’à minuit. Toutes les forces comme toutes les nationalités sont représentées dans cette enceinte, exclusivement consacrée aux récréations de l’intelligence et qui n’a donné accès aux billards qu’à titre de délassement de l’esprit.
Le prix de la partie varie entre 50 c. et 2 fr. La location de chaque échiquier, pour toute la durée d’une séance, est fixée à 40 c., dont les frais sont également partagés entre les deux adversaires.
À part quelques fâcheuses mais rares exceptions, une extrême courtoisie préside à ces réunions journalières, dont les habitués ont vieilli ensemble dans la satisfaction des mêmes goûts, et où les étrangers sont accueillis avec une hospitalité toute cordiale.
Parmi ceux que l’on peut avoir l’occasion d’y rencontrer, il faut nommer : MM. Neumann, A. de Rivière et Féry d’Esclands, lauréats du congrès international des échecs de l’exposition universelle de 1867, et auteur du dernier ouvrage (le Livre du Congrès) qui ait été publié sur les échecs ; Zamoïl Rosenthal (Polonais), le plus remarquable des joueurs rendant la pièce ; Baucher-Czarnowski (Polonais) ; Sivinski, François Devinck, ancien député de Paris ; Guibert ; Lequesne, non moins habile à faire et à démolir les problèmes qu’à créer les chefs-d’œuvre du joueur de flûte et de Pégase ; Hoffer (Allemand) ; Séguin-Mortimer (Américain) ; Boiron ; Dermenon ; Martin ; Saint-Léon ; de Maulevade ; Quentin ; Chapelle ; Wiart ; Delannoy, le fidèle et élégant traducteur poète des Psaumes de David ; le vicomte de Vaufreland ; le comte de Barbantane ; le marquis de Noé ; le prince de Villafranca et Valguarnera (compositeur connu sous le pseudonyme de Fabrice), etc.
La seule revue sérieuse sur les échecs est La Stratégie (20 fr. par an), qui parait le 15 de chaque mois depuis janvier 1867, et que rédige une société d’amateurs. Les deux ouvrages classiques, les meilleurs à la fois et les plus récents, sont : La Stratégie raisonnée des ouvertures du jeu d’échecs (24 fr.), publié en 1867, et Le Livre du Congrès (10 fr.), publié en 1869, dont il a été question tout à l’heure. Loin de s’exclure, ils se complètent plutôt en présentant l’accord de la théorie et de la pratique.
Tout ce qui se rapporte à la science des échecs (livres, échiquiers, pièces, diagrammes, etc ;) se vend chez Jean Preti, 72, rue Saint-Sauveur, qui donne des leçons à domicile à raison de 4 fr. de l’heure.
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