Dans un précédent article consacré à Mme Le Bey-Taillis, j'ai abordé le sujet de la création du célèbre cercle d'échecs parisien Caïssa aujourd'hui hélas disparu.
J'indiquais qu'un cercle "Caïssa" avait été créé en début d'année 1931 par Léonard Tauber, cercle privé qui ferma en 1939.
J'écrivais alors :
C'est sans doute à cette période (1939) qu'arrive Mme Jeanne Le Bey-Taillis qui sera présidente du Cercle Caïssa pour de très nombreuses années. Je vois deux hypothèses : soit un nouveau cercle portant le même nom "Caïssa" est créé, soit le cercle qui vient d'être fermé reprend vigueur grâce aux efforts de cette femme. J'ai une préférence pour la deuxième explication.
Et bien je me trompais ! C'est la première hypothèse qui est plutôt la bonne, comme je viens de le découvrir dans le bulletin de communication de la FFE de mars 1943 sous la plume de Louis Mandy.
Je lui laisse la parole dans cet article explicatif des origines du Cercle Caïssa.
Le Cercle Caïssa...
La F.F.E. entreprenant de faire l'historique et un résumé de l'activité des principaux cercles d'échecs de France, j'ai l'agréable devoir de commencer cette série par le Cercle Caïssa.
Tant par le nombre que par la qualité de ses membres, Caïssa est incontestablement le premier Cercle de notre Pays. Créé en 1939 par Mme Le Bey-Taillis, ce cercle prit le nom et en quelque sorte la succession d'une association de caractère privé, fondée précédemment par M. Tauber, Président d'Honneur de la F.F.E. Il appartenait cependant à sa Présidente actuelle de lui donner un développement et une lustre encore jamais atteint. Après avoir réuni quelques amateurs à son domicile privé. Mme Le Bey-Taillis lança officiellement son Cercle en juillet 1939 et en fixa le siège au Café de Madrid. Elle s'adjoignit alors comme Maître de jeu, le champion italien Max Romi.
La F.F.E. entreprenant de faire l'historique et un résumé de l'activité des principaux cercles d'échecs de France, j'ai l'agréable devoir de commencer cette série par le Cercle Caïssa.
Tant par le nombre que par la qualité de ses membres, Caïssa est incontestablement le premier Cercle de notre Pays. Créé en 1939 par Mme Le Bey-Taillis, ce cercle prit le nom et en quelque sorte la succession d'une association de caractère privé, fondée précédemment par M. Tauber, Président d'Honneur de la F.F.E. Il appartenait cependant à sa Présidente actuelle de lui donner un développement et une lustre encore jamais atteint. Après avoir réuni quelques amateurs à son domicile privé. Mme Le Bey-Taillis lança officiellement son Cercle en juillet 1939 et en fixa le siège au Café de Madrid. Elle s'adjoignit alors comme Maître de jeu, le champion italien Max Romi.
Journal "L'Action Française" du 4 décembre 1939 - En fait il s'agit ni plus ni moins que l'annonce de la création du nouveau cercle Caïssa
En novembre 1940. le Cercle Caïssa vint prendre possession de son siège actuel au Café Véfour, situé au fond des jardins du Palais Royal, dans un cadre calme, tranquille et historique où, de tout temps, les amateurs ont accoutumé de venir jouer aux échecs. Admirablement dirigé, le Cercle Caïssa ne cessa de croître et de prospérer. A Max Romi succéda. en 1941, le Maître Eugène Znosko-Borovsky comme professeur et directeur de jeu.
Le Cercle Caïssa groupe actuellement les meilleurs joueurs parisiens et l'émulation y est constamment entretenue par de fréquents tournois. Aucun joueur n'a le sentiment de s'y trouver ignoré, oublié, dédaigné. Bien au contraire, un joueur remporte-t-il un succès, il ne pourra s'endormir sur ses lauriers ; il devra faire mieux encore et tout sera mis en œuvre pour que sa forme se maintienne et s'améliore. Un autre subit-il un revers, il sera consolé et encouragé et tous les moyens seront déployé pour qu'II reprenne un peu de confiance en soi et reparte du bon pied.
C'est à Caïssa que la F.F.E, fit jouer en 1941 le Championnat de France, ainsi que le Championnat international de Paris.
En dehors de ces compétitions officielles, le Cercle Caïssa a ses épreuves qui lui sont propres et qui réunissent les plus forts joueurs de Paris. Citons notamment son Tournoi de Noël, gagné en 1941 par Louis Betbéder et en 1942, par Rossolimo.
C'est à Caïssa que la F.F.E, fit jouer en 1941 le Championnat de France, ainsi que le Championnat international de Paris.
En dehors de ces compétitions officielles, le Cercle Caïssa a ses épreuves qui lui sont propres et qui réunissent les plus forts joueurs de Paris. Citons notamment son Tournoi de Noël, gagné en 1941 par Louis Betbéder et en 1942, par Rossolimo.
Mais la raison du succès de Caïssa doit être recherchée, non seulement dans la qualité des joueurs que l'on peut y rencontrer, mais encore, et surtout, dans l'incomparable ambiance qui y règne.
Et puisque cette « communication » est destinée principalement à la propagande en faveur de nos Cercles français, je me permettrai de citer, dans une vaste parenthèse, deux souvenirs personnels permettant une utile comparaison qui me servira de conclusion.
Louis Betbeder - Cité par Dominique Thimognier, Héritage des Échecs Français
Peu avant la guerre, au cours de mes vacances, je séjournais dans un important centre touristique. Le guide du Syndicat d'Initiative local contenant une invitation aux amateurs de passage de rendre visite au cercle d'échecs ; au jour et à l'heure indiqués, je m'y présentai et découvrai sans difficulté quelques joueurs en train de faire leur partie. Poliment Je priai l'un d'eux de m'indiquer l'animateur du Cercle. Sa seule réponse fut un informe grognement accompagné d'un coup de menton en direction du garçon. Ce dernier, consulté, m'informa que le président faisait sa « belote » et qu'il allait lui signaler ma présence. Grands dieux, quelle audace. Sans quitter des yeux son éventail de cartes, « l'animateur » (?) jeta au garçon quelques paroles que je n'entendis pas mais dont le sens, vu sa mine courroucée, devait être le suivant « que ce raseur aille au diable, je n'ai pas le temps de me déranger ».
Fort gêné, le messager m'apporte, quoique traduite en termes plus académiques, cette réponse néanmoins catégorique. Je le remerciai et partis.
Plus récemment, visitant les cercles parisiens pour me rendre compte de leur activité, je pénétrai un jour dans un cercle qui fut naguère l'un des plus importants de Paris.
Dans une salle réservée, loin de la vue du profane, une dizaine de joueurs « poussaient du bois ». Je sacrifiai un quart d'heure à suivre, debout, les diverses parties. Personne n'eut l'air de s'apercevoir de ma présence. Je revins quelques jours après et restai une demi-heure. Même résultat. Désirant poursuivre l'expérience, je fis une troisième visite qui dura cette fois-ci une heure entière. Des parties furent jouées, terminées. des amateurs arrivèrent, d'autres se levèrent pour partir. On me vit, mais personne ne daigna m'adresser la parole, personne ne me demanda si je m'intéressais aux échecs, si je désirais un partenaire, si j'avais l'intention d'apprendre à jouer aux échecs... Rien.
J'arrête là cette longue digression pour signaler bien haut que ces méthodes n'ont pas cours à Caïssa. Un inconnu pénètre-t-il au Cercle, la Présidente elle-même, d'un mot aimable lui souhaite la bienvenue, s'enquiert aussitôt de ses désirs et, suivant le cas, lui donne les renseignements sollicités, lui cherche un partenaire de sa force, etc...
Et j'arrive à ma conclusion pratique : l'amateur reviendra dans un cercle où il reçoit un bon accueil, tandis qu'il fuira instinctivement celui où personne ne cherche à l'attirer d'abord, à le retenir ensuite. Le Cercle Caïssa doit donc être hautement loué et remercié pour ses efforts en faveur des Échecs.
Mais il doit l'être aussi pour sa pratique de la politesse de bon aloi et de l'exquise courtoisie qui firent jadis la renommée de notre Pays et dont certains groupements échiquéens — puisque ce sont eux qui nous intéressent plus particulièrement — semblent bien avoir perdu jusqu'au souvenir.
Louis MANDY
Retronews - Photo parue dans le journal collaborationniste "L’œuvre" du 20 août 1943. César Boutteville est sur la droite.
... et son espoir.
César Boutteville, l'un des meilleurs joueurs et jeune espoir du Cercle Caïssa, apprit à jouer aux échecs vers l'âge de 13 ans. Quelques années plus tard, il est champion de Lille. Puis il vint à Paris et prend part à tous les tournois, ainsi qu'aux Championnats de France 1941 et 1942 dans lesquels il se classe honorablement. Voici, avec les notes de l'ancien champion de France, R. Crépeaux, une de ses parties qui obtint le prix de beauté au récent tournoi du Cercle Caïssa.
[Event "Tournoi du Cercle Caissa"]
[Site "?"]
[Date "1943.??.??"]
[Round "?"]
[White "Boutteville, César"]
[Black "Znosko-Borovsky, Eugène"]
[Result "1-0"]
[ECO "D46"]
[PlyCount "57"]
{Partie publiée dans le
bulletin de communication de la FFE de mars 1943. Commentaires de l'ancien
champion de France Robert Crépeaux.} 1. d4 d5 2. Nf3 Nf6 3. c4 c6 4. e3 Nbd7
5. Nc3 e6 6. Bd3 Bd6 7. e4 dxe4 8. Nxe4 Nxe4 9. Bxe4 Nf6 {Ce coup enlève aux
Noirs la possibilité de se libérer ultérieurement par e5.} ({Etait à
envisager} 9... e5 10. O-O exd4 11. Qxd4 Qf6 {etc}) 10. Bc2 O-O 11. O-O c5 12.
dxc5 Bxc5 13. Qe2 h6 {Affaiblit la position du Roi Noir.} ({Il est vrai que}
13... b6 14. Bg5 Bb7 15. Rad1 {suivi sur De7 de Ce5 menaçant Cg4 n'aurait pas
été agréable.}) 14. a3 b6 15. b4 Be7 16. Bb2 Bb7 17. Rfe1 Rc8 18. Be5 Qd7
19. Nd4 Rfd8 20. Rad1 Qe8 21. Qd3 {Menace de mat} Kf8 ({Par exemple} 21... a6
22. Bxf6 Bxf6 23. Qh7+ Kf8 24. Qh8+ Ke7 25. Nf5#) 22. f4 {Provoque un nouvel
affaiblissement des Noirs par la menace f4-f5.} g6 23. Qh3 Ng8 ({Si} 23... Rxc4
24. Qxh6+ Kg8 25. Nxe6 fxe6 26. Bxg6 Rxd1 27. Rxd1 Qf8 28. Bh7+ Kh8 (28... Nxh7
29. Qg6+) 29. Rd8 $1 Qxd8 30. Bf5+ Kg8 31. Bxe6#) 24. Bxg6 $1 {Sacrifice très
correct et décisif} fxg6 ({Pouvait être envisagé :} 24... Rxd4 25. Bxd4 fxg6
26. Rxe6 Rd8 27. f5 Qa4 {Mais après le coup} 28. Rd2 {on ne trouve plus de
suite satisfaisante pour les Noirs.}) 25. Nxe6+ Kf7 26. f5 Rxd1 27. fxg6+ Kxg6
28. Nf4+ Kf7 29. Qh5+ 1-0