Au hasard de mes recherches, je suis tombé sur plusieurs articles de journaux qui mentionnent un fait divers avec un lien ténu avec le Café de la Régence. Néanmoins je le trouve intéressant car cela permet de connaitre une personne qui a travaillé à la Régence dans les années 1880. Il est également intéressant de voir comment ce fait divers est traité par les journaux de l’époque...
Joseph Marie Grosroyat, 43 ans, célibataire, demeurant au 40 rue des deux écus, est cuisinier au Café de la Régence. Le samedi 26 juin 1880 à 17h30 (d’après le jugement consultable aux archives de Paris) arrive un fâcheux incident alors qu’il se rend probablement pour son service du soir à la Régence.
Le Figaro du 27 juin 1880 explique l’affaire de façon assez factuelle, même si le nom du cuisinier est très approximatif.
Hier soir, à cinq heure moins un quart, le sieur Grosolial (sic), cuisinier au Café de la Régence, demeurant, 40, rue des Deux-Ecus, tournait l’angle de l rue Saint-Honoré et de la rue des Bons-Enfants.
La voiture numéro 11.461, Compagnie l’Urbaine, conduite par le cocher Perrin, arrivait en sens inverse. Grosolial se trouva serré entre le trottoir et la voiture qui lui toucha assez fortement le pied. Il avait à la main un paquet, contenant divers ustensiles qu’il rapportait de chez le repasseur. Instinctivement, il étendit la main vers le cocher qu’il frappa avec ce paquet. Puis il voulut continuer son chemin.
A ce moment on vit le cocher pâlir. Il descendit de son siège et l’on s’aperçut qu’il perdait le sang par une blessure qu’il avait au bas ventre. Un couteau, dépassant le paquet, lui avait perforé l’abdomen.
Il a été conduit à la pharmacie du passage Montesquieu, puis à l’hôpital Lariboisière. Son état est des plus graves. Grosolial a été mis à disposition de M. Allais, commissaire de police.
Il a été conduit à la pharmacie du passage Montesquieu, puis à l’hôpital Lariboisière. Son état est des plus graves. Grosolial a été mis à disposition de M. Allais, commissaire de police.
Le journal Gil Blas du 28 juin 1880 fait moins dans la dentelle. Grosroyat est décrit comme un assassin qui a sciemment poignardé le cocher. Curieusement l’article lui donne le prénom « Gérard ».
Petites Nouvelles
En tournant le coin de la rue des Bons-Enfants et de la rue Saint-Honoré, le fiacre n° 1,461, frôla légèrement le pied d'un passant. Furieux, celui-ci se précipita sur le cocher et le frappa d'un coup de couteau dans le bas-ventre.
Le blessé a été transporté dans un état désespéré à l'hôpital Lariboisière. Quant à l'assassin, qui se nomme Gérard et exerce la profession de chef de cuisine, il a été écroué sur-le-champ au Dépôt.
Le journal Le Temps du 28 juin 1880 reprend lui aussi l’idée d’un coup de couteau volontaire « (…) lui faisant une plaie de trois centimètres de profondeur. (…) » et fait dans le pathos « (…) ce malheureux, qui est veuf, est père d’un enfant de dix ans (…) ».
Le point final est donné par le journal Gil Blas du 29 juin 1880 (voir ci-dessous). Les trois centimètres de la blessure sont devenus trois coups de couteau et le malheureux cocher est mort des suites de ses blessures. Son fils ayant pris deux ans en une journée. Le journal La Presse ne fera guère mieux le même jour, annonçant également la mort du cocher, et le lendemain, le 30 juin 1880, le journal Le Peuple Français titrait « Assassiné par accident ».
Petites Nouvelles
En tournant le coin de la rue des Bons-Enfants et de la rue Saint-Honoré, le fiacre n° 1,461, frôla légèrement le pied d'un passant. Furieux, celui-ci se précipita sur le cocher et le frappa d'un coup de couteau dans le bas-ventre.
Le blessé a été transporté dans un état désespéré à l'hôpital Lariboisière. Quant à l'assassin, qui se nomme Gérard et exerce la profession de chef de cuisine, il a été écroué sur-le-champ au Dépôt.
Le journal Le Temps du 28 juin 1880 reprend lui aussi l’idée d’un coup de couteau volontaire « (…) lui faisant une plaie de trois centimètres de profondeur. (…) » et fait dans le pathos « (…) ce malheureux, qui est veuf, est père d’un enfant de dix ans (…) ».
Le point final est donné par le journal Gil Blas du 29 juin 1880 (voir ci-dessous). Les trois centimètres de la blessure sont devenus trois coups de couteau et le malheureux cocher est mort des suites de ses blessures. Son fils ayant pris deux ans en une journée. Le journal La Presse ne fera guère mieux le même jour, annonçant également la mort du cocher, et le lendemain, le 30 juin 1880, le journal Le Peuple Français titrait « Assassiné par accident ».
Nous avons raconté, hier, que, pris tout à coup d'un accès de folie furieuse, un employé d'un des grands cafés parisiens, nommé Grosolial, s'était élancé sur un cocher dont la voiture l'avait légèrement frôlé au coin de la rue Saint-Honoré, et l'avait frappé de trois coups de couteau.
Le pauvre diable avait été aussitôt transporté à l'hôpital Lariboisière, sans avoir pu reprendre connaissance. Il y est mort, hier, dans la matinée, a milieu d'atroces souffrances. Le malheureux laisse un pauvre petit garçon de douze ans, qui se trouve aujourd'hui entièrement abandonné.
Le cocher Perrin et le cuisinier Grosroyat se retrouvent tous les deux au tribunal en octobre 1880, et le Journal des Débats publie un résumé du jugement dans son édition du 11 octobre 1880.
Bulletin judiciaire
Le 26 juin dernier, vers six heures du soir, Perrin, cocher de la Compagnie l'Urbaine, conduisait sa voiture au stationnement de la rue Radziwill. Son cheval allait au pas. Au moment où il tournait la rue Saint-Honoré pour entrer dans la rue des Bons-Enfans, Grosroyat, cuisinier au café de la Régence, n'entendant pas les cris de « Gare ! » poussés par le cocher, descendait du trottoir et posait le pied sur la chaussée.
La roue de droite de la voiture effleura l'extrémité du pied gauche de Grosroyat. Ce dernier injuria le cocher et, dans un moment de colère irréfléchi, frappa Perrin avec un paquet d'outils qu'il tenait à la main.
Malheureusement, au milieu d’autres instruments se trouvait un couteau de cuisine long et effilé, dont la pointe atteignit le cocher au bas ventre et lui fit une affreuse blessure. L'état de Perrin ayant paru grave, ce malheureux fut conduit à l'hôpital Lariboisière, où il est resté soixante-deux jours.
Aujourd'hui encore Perrin n'est pas complétement guéri des suites de sa blessure. Grosroyat, poursuivi pour coups volontaires, vient de comparaître devant la police correctionnelle. Perrin s'est porté partie civile.
Sur les plaidoiries de Maître Georges Petit pour Perrin, et de Maître Charbonnel pour Grosroyat, le tribunal a condamné le prévenu à six jours d'emprisonnement et à. 1,000 fr. de dommages-intérêts.
1000 francs représente une somme assez considérable à l’époque, représentant la moitié d’un salaire d’un ouvrier pour 6 mois.
Par curiosité j’ai consulté le jugement du tribunal correctionnel de Paris aux archives de la ville de Paris. Le début du document de jugement indique les éléments suivants :
Pour le Procureur de la République
et
Le sieur Perrin Jean Marie, 43 ans, cocher, demeurant à Paris, rue Doudeauville (NDA - près de Montmartre), n°77, assisté par les conclusions écrites signées de Maître Aymé, avoué
Contre
Lib. (NDA – Libre ?) Grosroyat Joseph Marie, 43 ans, cuisinier, né à Nasbinals, arrondissement de Marvéjols (Lozère) , le 27 mai 1837, de Jean Jacques et de Marie Jeanne Coste, demeurant à Paris, rue des deux écus, n°40, célibataire.
Coups et blessures, blessures par imprudence (…)
Attendu qu’il n’est pas établi que Grosroyat ait volontairement porté le coup dont il s’agit (…)
(…) La roue droite de la voiture lui pressa l’extrémité de son pied (…).
J’ignore si Perrin a vécu longtemps après ce grave incident et si Grosroyat a conservé son travail au Café de la Régence.
Pour se situer dans le quartier
1 - Café de la Régence - 161 rue Saint-Honoré
2 - Angle de la Rue Saint-Honoré et de la rue des Bons-Enfans
3 - 40 rue des Deux-Ecus, adresse de Grosroyat
4 - Stationnement des fiacres de la rue Radziwill