...Où l'on découvre que la BNF a mis en ligne sur Gallica une "vulgaire" copie pirate de la première édition du livre de Philidor.
Le buste de Philidor, par Augustin Pajou - Musée Carnavalet, Paris.
Le sculpteur Pajou a l'habitude de fixer les traits de ses amis, tel Philidor (1726-1795), ici âgé de 57 ans.
NB : cet article est basé sur les découvertes effectuées par Jean Mennerat au sujet du livre de Philidor.
Découvertes que Jean-Baptiste Grange, responsable du patrimoine de la bibliothèque de Belfort, a bien voulu me faire partager.
Je l'en remercie, d'autant plus que ce fut pour moi une découverte totale.
J'ignore si la découverte de Jean Mennerat, que j'indique ci-dessous, a déjà été publiée.
A.D.Philidor publie en 1749 la première édition de son célèbre livre "L'Analyze des Echecs".
Dans son introduction, on trouve bien évidemment sa célèbre maxime :
« Mon but principal est de me rendre recommandable par une nouveauté dont personne ne s’est avisé, ou peut-être n’en a été capable : c’est celle de bien jouer les Pions. Ils sont l’âme des Échecs.
Ce sont eux uniquement qui forment l’attaque et la défense, et de leur bon ou mauvais arrangement, dépend entièrement le gain ou la perte de la partie.
Un joueur, qui ne sait pas (même en jouant bien un Pion) la raison pour laquelle il le joue, est à comparer à un général qui a beaucoup de pratique et peu de théorie. »
Puis, Philidor publie en 1777 une nouvelle version de son livre "considérablement augmentée" où l'on trouve par exemple Diderot et le Chevalier d’Éon parmi les souscripteurs.
Et enfin en 1790 une troisième et dernière version de son vivant, dont voici ce qu'en dit La Stratégie (Biographie de Philidor publiée dans La Stratégie d’octobre et novembre 1886 et janvier 1887)
« Dans les lettres de Philidor, on voit qu’il s’efforçait de payer ses dépenses personnelles à Londres avec l’argent qu’il gagnait de cette manière et dans les parties particulières et qu’il envoyait à sa famille toute la somme qu’il recevait annuellement des membres du club. L’importance de cette somme n’est pas exactement connue. En 1790 fut publiée à Londres, probablement avec le consentement de l’auteur, une édition en anglais de son analyse augmentée de nouvelles variantes et avec neuf parties jouées par Philidor sans voir.»
Mais revenons à l'édition de 1749.
Le succès du livre de Philidor est immédiat. La protection des œuvres n'existe pas encore à cette époque et rapidement plusieurs copies sont imprimées, se faisant passer pour les livres issus de la souscriptions originale. En tout cas, dans sa démarche de collectionneur, Jean Mennerat fait l'acquisition à la fois d'un exemplaire original de 1749, mais également de copies datées de la même année.
Dans plusieurs notes manuscrites, insérés dans ces livres, il explique les différences parfois subtiles entre l'édition originale et les copies. Philidor était-il au courant de l'existence de ces copies ? La question reste ouverte.
Comment reconnaître une édition originale du livre "L'Analyze des Échecs" de 1749, issue de la souscription, d'une copie opportuniste (ou copie pirate, comme les nomme Jean Mennerat) ?
La première édition du livre de Philidor comporte 127 souscripteurs pour 433 exemplaires.
Elle contient 170 pages + 21 pages préliminaires.
La vignette sur la première page représente un plateau de fruits.
Au passage, Jean Mennerat signale une faute d'orthographe en latin sur la première page (des originaux et des copies). Il précise :
"La faute de grammaire, effigie au lieu d'effigiem, vient peut-être d'une erreur typographique sur un exemplaire de Vida peut-être lu par Philidor. Il est possible qu'un tel exemplaire existe".
Les copies pirates présentent plusieurs différences, même si l'année de publication indiquée est la même, à savoir 1749 - MDCCXLIX.
La liste des souscripteurs n'est pas précisée.
Chaque livre contient 162 pages + 14 pages préliminaires.
Et les vignettes de première page sont différentes, avec soit deux cornes d'abondance, soit deux oiseaux.
Fonds Jean Mennerat - Belfort
Une édition pirate, le plateau de fruits est remplacé par deux oiseaux.
Fonds Jean Mennerat - Belfort
Une autre édition pirate.Jean Mennerat a également découvert un détail sur la première page.
le mot "temps" (avec l'orthographe "tems" de l'époque) est écrit avec un "T" majuscule dans l'édition originale, et avec un "t" minuscule dans les copies pirates.
Les deux points pour identifier une édition originale d'une copie + la faute d'orthographe en latin (présente y compris sur les éditions pirates).
Avec un "T" majuscule, c'est l'édition originale.
Un "t" minuscule, c'est une copie pirate...
Vous avez maintenant les cartes en main pour déjouer les faussaires du XVIIIe siècle et les copies pirates :-)
Pour en revenir à la première phrase de cet article, vous pouvez maintenant aller consulter la version numérisée par la BNF et présente sur Gallica...
Vous savez désormais qu'il s'agit d'une vulgaire copie pirate et non d'un original de Philidor !
Une copie pirate, numérisée par la BNF et présentée à tort comme l'édition originale.
Source Gallica.
Jean-Olivier, pour le dessin au moins c'est très connu des bibliophiles de mémoire.
RépondreSupprimerConcernant la faute d'orthographe par contre, je ne m'en souviens pas.
Pour plus de certitude, il faudrait contacter quelques collectionneurs...
Alain
Merci Alain pour cette précision. Je l'ignorai jusqu'à présent :-)
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