dimanche 25 septembre 2022

Match Paris-Londres par correspondance

Avec la rivalité entre les deux pays, la France et l'Angleterre, le fait de montrer sa supériorité par une joute intellectuelle comme le jeu d'échecs apparait comme étant d'une grande importance, surtout quelques années seulement après la cinglante défaite de Waterloo.

Le seul portrait connu à ce jour de La Bourdonnais - Le Palamède 1842

La première tentative d'un match par correspondance semble être à l'initiative des Français en fin d'année 1823, et plus particulièrement de la part de La Bourdonnais. Malheureusement le match n'aura pas lieu.
Il faudra attendre 1834 pour qu'une deuxième tentative aboutisse, avec une victoire totale des joueurs Français...

Voici quelques extraits de journaux de l'époque au sujet du match avorté. Détail intéressant, on y apprend qu'il existait alors à Paris un Cercle Philidor, au-dessus du Café de la Régence, à ne pas confondre avec le Cercle Philidor qui sera fondé dans les années 1880 à Paris et qui subsistera jusqu'à la deuxième guerre mondiale.
 
La Bourdonnais est appelé "le second joueur d'échecs de Paris" par les Anglais, le premier étant Alexandre Deschapelles qui se retira peu de temps après des échecs, pour revenir en 1836.


14 février 1824 Journal des débats - Retronews

Le club des échecs de Paris a invité le club des échecs de Londres à jouer une partie. L'enjeu est de 50 guinées. Deux comités de cinq membres dirigent les opérations de cette guerre pacifique. Les mouvements sont transmis d'une capitale à l'autre par la poste.
 
Le Journal des débats est alors un peu en retard sur l'actualité, car en fait le match est déjà annulé, comme on l'apprend dans Le Pandore du 23 février 1824.
 


GUERRE ENTRE LA FRANCE ET L'ANGLETERRE.
 
Quoique la politique nous soit interdite, nous osons annoncer avec assurance que la guerre s'est rallumée entre la France et l'Angleterre. Le Courrier anglais avait déjà parlé du défi porté par le club des Échecs de Paris, nommé le Cercle de Philidor, au Chess-club de Londres; les mouvements devant être transmis par la poste ou par courriers extraordinaires.
 
Le défi a été accepté, et cinquante guinées ont été déposées pour l'enjeu. Mais il parait que la discorde s'est introduite dans le Cercle de Philidor, qui est sur le point d'être dissous. En conséquence , M. de la Bourdonnaye , qui est le second joueur d'échecs de Paris (second player in Paris), a rompu la gageure.
Deux parties devaient être jouées en même temps ; les Français enraient eu le premier coup dans l'une, et les Anglais dans l'autre ; et l'on a calculé que, si les coups étaient transmis par la poste , ces deux parties auraient duré environ un an. 

Un enthousiaste des échecs du club de Londres a prétendu que l'honneur national était compromis dans une telle affaire , et que les ministres devraient rétablir les communications télégraphiques entre les deux pays pour cet objet spécialement.
Ce projet abrégerait considérablement la durée de ces parties, et ne coûterait aux deux pays que la bagatelle de dix mille livres sterlings ( 250,000 francs). 

Et finalement le club de Londres jouera un match contre un cercle Écossais comme nous l'apprend un journal Britannique parmi d'autres.


13 mai 1824 – Devizes and Wiltshire Gazette - Article que j'ai partiellement traduit en Français

Nous avons indiqué il y a quelque temps que le Club d'échecs de Paris, appelé le Cercle de Philidor, avait lancé un défi au Club d'échecs de Londres pour toute somme que ce dernier pourrait désigner ; les coups devaient être transmis soit par la poste, soit par des courriers extraordinaires.
Le London Chess-Club accepta le défi, nomma un comité de ses propres membres pour diriger les coups, et proposa que la mise soit de 50 guinées par partie. Une réponse fut renvoyée par M. Labourdonnaye, le premier joueur d'échecs de Paris, qui envoya le défi de la part du Club français, déclinant le match, au motif que le Cercle de Philidor était sur le point de se dissoudre.
 
En 1836, La Bourdonnais lance son journal d'échecs Le Palamède, et un des tous premiers articles qu'il rédige est consacré justement au match entre Paris et Londres par correspondance, match commencé deux années auparavant en 1834. La Bourdonnais nous parle également des évènements de la fin d'année 1823. 
 
Le Palamède 1836

UN DÉFI PAR CORRESPONDANCE.
 
On a beaucoup entendu parler de ces interminables parties d'échecs qu'on se léguait eu mourant, en Espagne surtout ; aussi, plusieurs fois on est venu me demander s'il était vrai que j'eusse accepté de continuer une partie par correspondance commencée par Philidor il y a soixante ans. A diverses époques, de forts amateurs d'échecs, séparés par de grandes distances, ont effectivement joué par lettres. 

En 1821, quelques amateurs formèrent un cercle au-dessus du café de la Régence, et le nommèrent cercle de Philidor. M. Deschapelles en était le président , et moi le secrétaire. Nous envoyâmes un défi au club de Londres, laissant nos adversaires maîtres de fixer la somme qu'ils voulaient engager. Les Anglais nous répondirent au bout de trois mois. Dans l'intervalle, quelques divisions s'étaient glissées dans notre cercle, dont le local était trop rétréci. Nous nous trouvâmes dans la nécessité de suspendre le défi. Les journaux anglais s'étaient beaucoup occupés de cette petite guerre ; dès qu'ils virent qu'elle ne s'engageait pas, ils dirent que probablement les Français avaient craint une seconde journée de Waterloo. 

Alors je me décidai à partir pour l'Angleterre, et bien qu'à cette époque je ne fusse regardé que comme de seconde force en France, je donnai un défi à tous les joueurs d'Angleterre. Ils acceptèrent et furent battus.
 
Il y a deux ans, un club d'échecs de Paris a proposé un défi à un club de Londres ; le défi a été accepté, et l'une des parties, la première, a déjà été perdue par les Anglais; l'autre continue, et nous parait belle. Le défi ne se compose que de deux parties. MM. Boncourt, Saint-Amant, Alexandre et Cbamouillet ont supérieurement conduit le jeu français. 
 
Voici les deux parties de ce match entre Paris et Londres, match commencé en 1834 et achevé en 1837 par deux victoires.La partie où Paris est le joueur en second est particulièrement intéressante d'un point de vue historique.C'est en effet après cette partie que la partie du pion Roi un pas devient la partie Française...
Une défense particulièrement appréciée par le joueur Jacques François Mouret qui en était le promoteur. 
 
La première partie est commentée par La Bourdonnais, et la seconde par Saint-Amant, dont les commentaires sont particuliers :-)


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A noter qu'en fait le club de londres avait les noirs et le trait. Pour une lecture moderne de la partie je leur donne les blancs - JOL. 1.e4 e6 2.d4 d5 3.exd5 exd5 4.Nf3 Nf6 5.Bd3 c5 6.Qe2+ Ce coup de la part des blancs est une faute. Cet échec fait sortir une pièce aux noirs et place la dame devant le roi, position souvent dangereuse. Be7 7.dxc5 0-0 8.Be3 Les blancs, en jouant ce coup, veulent défendre le pion qui a pris le gambit de la dame, et cette défense est très dangereuse; ils auraient mieux fait de roquer et d'abandonner le pion. Re8 9.Bb5 Ce coup est très mal joué, il ne sert qu'à faire dégager le jeu de son adversaire. Nc6 10.Nd4 En portant à cette case leur cavalier, les blancs pensent gagner un pion ou forcer les noirs à un coup de défense; ils se trompent de nouveau, les coups suivants vont le démontrer Bxc5 11.Bxc6 Si les blancs avaient pris le cavalier avec leur cavalier, les noirs n'auraient pas dù reprendre, mais porter leur dame à la troisième case de son cavalier; par ce coup, ils auraient repris leur pion avec une excellente position. 11.Nxc6 Qb6! 11...bxc6 12.c3 Les blancs ne peuvent prendre le pion avec leur cavalier, car s'ils le faisaient, les blancs, en jouant leur dame à la 3è case de son cavalier, gagneraient une pièce 12.Nxc6 Qb6! 12...Bxd4 13.cxd4 c5 14.Qd3 C'est ici que l'on peut voir combien la position de la dame blanche devant son roi était dangereuse. Les blancs, sur ce coup, en portant leur dame à sa 3è case, jouent encore fort mal; elle eût été mieux placée à sa deuxième case. Qb6 15.0-0 Ba6 16.Qb3 Qxb3 17.axb3 Bxf1 18.Kxf1 Ng4 19.dxc5 Nxe3+ 20.fxe3 Rxe3 21.Nd2 Rae8 22.b4 Rd3 23.Rxa7 Les blancs, en prenant ce pion et en abandonnant leur cavalier, terminent par une faute grave une partie fort mal jouée dès le début. S'ils voulaient continuer la partie qu'ils devaient perdre infailliblement, il fallait conserver ce cavalier; en le perdant, ont-ils cru pouvoir conduire à dame leurs pions, c'est difficile à croire; il s'est toujours écoulé quinze jours entre chaque coup de cette partie, et il ne faut pas quinze minutes pour voir que les noirs arrêteront facilement les pions des blancs dans leur marche, et resteront avec une tour de plus. Au reste, si toutes les parties par correspondance devaient être jouées ainsi, il faudrait renoncer à ce mode, car cette partie n'est certainement pas un modèle, et ne peut faire faire aucun progrès au jeu; cependant elle a duré près de deux ans. Rxd2 24.b5 Rxb2 25.b6 d4 26.b7 d3 27.Ra8 Kf8 Dans cette position, le club de londres a abandonné la partie comme perdue. 0–1
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Londres-Paris Cercle des Echecs-0–1C01
Paris Cercle des Echecs-Londres-1–0C56

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